Amis à la ville, anciens apprentis comédiens au Conservatoire de Paris, les voilà enfin réunis dans un projet professionnel, un long-métrage où ils campent deux frangins, Jouer avec le feu, signé par deux frangines : Delphine et Muriel Coulin. De passage à Sarlat, Benjamin Voisin et Stefan Crepon commentent leur collaboration, leur amitié, et leur goût du jeu.
La rencontre
Stefan Crepon
« C’était au moment où je suis entré au Conservatoire de Paris (Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique). On s’est rencontrés en buvant une bière à une table haute, un tonneau, devant le bar attitré du Conservatoire… La Pause du Conservatoire, dans le 9e arrondissement. »
Jouer ensemble
Benjamin Voisin
« On a beaucoup travaillé ensemble avant, mais Jouer avec le feu est notre premier projet professionnel que les gens auront la chance – ou non, selon leurs goûts – de voir. »
Stefan Crepon
« Nous avons tourné ensemble dans un court-métrage, à la sortie du confinement, à l’arrache et en improvisation. Il est réalisé par la jeune actrice Lomane de Dietrich, qu’on a vue dans Le Retour de Catherine Corsini, et il sera bientôt visible.
Nous avons été castés en même temps pour jouer les deux frères dans Jouer avec le feu, parce que nous sommes amis dans la vie. C’est la directrice de production Aude Cathelin, avec qui on avait eu la chance de travailler l’un et l’autre, dans les films de François Ozon, et sur La Prière de Cédric Kahn pour moi, qui a dit en préparation aux sœurs Coulin, qui cherchaient des frères, qu’elle connaissait deux mecs qui ne le sont pas, mais tout comme, et qu’elles devraient peut-être nous voir en essais. Elles ont voulu tester cette complicité. »
Jouer à deux devant deux femmes
Benjamin Voisin
« C’est bien de jouer l’amour fraternel et paternel, mis en scène par deux femmes. On esquive beaucoup de clichés d’hommes. Je ne sais pas si le film aurait été intéressant s’il avait été réalisé par deux hommes. Il aurait peut-être été plus trivial. Personnellement, j’aime la rencontre des genres par le biais de la caméra, certains devant, d’autres derrière, et cela a excité mon intérêt pour le projet. »
Être filmé par un duo
Stefan Crepon
« Les deux fois où cela m’est arrivé, pour Premier mercredi du mois de Mélodie Adda et Adrien Rozé, court-métrage très joli et tendre, et pour Jouer avec le feu, les deux cinéastes se répartissaient très bien la tâche. L’un/l’une plus proche des acteurs, et l’autre plus proche de la technique, et ils alternaient. En tout cas, les sœurs Coulin alternent. Elles savent très bien endosser les différents postes. On ne reçoit pas trop d’informations en même temps, ni contradictoires. Elles gèrent très bien tout le processus. »
Le code couleur rouge pour Félix (Benjamin Voisin)
Benjamin Voisin
« Quand j’étais filmé pour des moments phares de mon personnage et qu’il bougeait, qu’il s’actionnait, je sentais fortement le rouge près de moi. Que ce soit au niveau des rideaux, ou même dans les scènes de procès. Il y a beaucoup de moments où le rouge est leitmotiv. Donc, on se laisse prendre au jeu, on se croit taureau, on a l’impression qu’on est aidé par le sang qui est derrière, et que jouer quelque chose de très lourd est plus facile avec la couleur qui va faire monter encore plus l’émotion qu’on est en train de véhiculer. Mais tout cela, c’est parce que je suis un peu fou, et que je conscientise les choses ! Beaucoup d’acteurs s’en foutent complètement et ça marche aussi sans. Cela me rassurait sur les sœurs Coulin. Je me disais qu’elles savaient précisément où elles allaient, et ce qu’elles voulaient faire avec mon rôle. Je pouvais rester très serein, sans peur du ridicule, et aller expérimenter plein de choses. »
François Ozon, cinéaste en commun (Été 85 / Peter von Kant)
Stefan Crepon
« Quand Benjamin tournait Été 85, on avait un peu échangé sur François, j’avais appris comment il était, mais surtout j’avais pu le rencontrer. Je l’ai donc un peu côtoyé dans la vie avant de travailler avec lui. »
Benjamin Voisin
« Et François a pensé à Stefan pour le rôle de Karl dans Peter von Kant en le rencontrant dans la vie de tous les jours. Je ne suis même pas sûr que quelqu’un lui ait dit de voir Stefan pour le rôle. François est très proche de ses acteurs. On est très amis avec lui, comme beaucoup de ceux qui ont travaillé avec lui. Il a une manière de tourner tellement bizarre, agréable, ça va tellement vite. On ne sait pas vraiment quand ça tourne ou pas. Quinze jours de tournage, ça n’a pas de sens. Tourner avec François, ça n’a pas de sens. Je me souviens en effet que je racontais pas mal de choses à Stefan, et plus tard de sa joie de collaborer avec François, de voir le tourbillon. C’est bien qu’il y en ait eu un pour défricher un peu, et dire à l’autre : « Si t’as l’occasion, fonce ! ». Tout comme Stefan a, je pense, très envie de tourner avec Xavier Giannoli, et j’ai très envie de tourner avec Cédric Kahn. »
Être cantonné ou non à un emploi
Stefan Crepon
« On peut sentir parfois, quand on reçoit une proposition, si c’est un choix évident, car le ou la cinéaste a déjà vu tel ou tel de nos projets, ou si c’est un choix curieux. Là, on se dit que la personne veut nous emmener ailleurs. Dans les deux cas, la proposition peut déboucher sur une collaboration intéressante. »
Benjamin Voisin
« Je ne sais pas comment j’ai mené ma barque, mais je suis très content de tout. Parfois, je suis surpris de certaines propositions, et je peux voir des producteurs se battre pour que ça se fasse, quitte à perdre de l’argent, par rapport à un choix d’acteurs qui pourraient le faire mieux. Je suis très heureux de ce qui m’arrive et qu’il y ait des gens qui aient la curiosité de m’emmener dans des univers où, en termes de production, ça serait plus facile avec d’autres comédiens. Ils pensent peut-être pouvoir gagner quelque chose de plus intéressant, et c’est comme un honneur pour moi. Et je suis content de ne pas refaire le même film à chaque fois. »