La 32e édition sarladaise du Festival du film a lancé ses festivités malgré le froid périgourdin, sous le signe de la jeunesse et sous le signe du féminin. Un double axe bienvenu en ces temps lourdement troublés, où les regards se tournent vers le grand écran pour conjurer les grondements, et espérer dans la vibration humaine.
La directrice artistique Christelle Oscar l’a proclamé dans son discours d’ouverture, ce mardi soir sur la scène de la grande salle du cinéma Le Rex à Sarlat : il faut avoir envie de tout voir, oublier les a priori, et prendre des risques quand on est spectateur et spectatrice de festival. C’est la moindre des choses, et c’est la meilleure marche à suivre pour s’immerger et ressentir. Pour accueillir chaque film comme une rencontre dont on ne connaît pas tout à l’avance. C’est le cas du premier long-métrage présenté en ouverture de cette édition, La Nouvelle Femme de Léa Todorov. La jeune cinéaste française a redonné vie à Maria Montessori, pour mieux raconter son engagement auprès de l’enfance et de l’éducation, envers et contre tout, tous et toutes, dans l’Italie et l’Europe corsetées du début du XXe siècle, à travers sa rencontre avec une courtisane parisienne.
Ce biopic, croisé avec le film d’époque, s’avère une ode à la sororité, tant il célèbre l’entraide et l’encouragement finalement mutuel de deux femmes déjouant les injonctions, dans une époque où le diktat sévissait sévèrement. Le Romaine Jasmine Trinca et la Francilienne Leïla Bekhti incarnent avec engagement deux facettes d’une détermination chevillée au corps. Et tout cela devant la caméra d’une héritière de lettres et de signes, qui trace aujourd’hui son chemin propre. Léa Todorov, fille de l’autrice Nancy Huston et du sémiologue Tzvetan Todorov, met à profit ses riches racines dans un geste artistique personnel, pour mieux célébrer des pionnières. La cinéaste s’est aussi exprimée dans la journée auprès des classes de lycées option cinéma, qui avaient débuté leur périple festivalier la veille au soir, avec le corrosif Affreux, sales et méchants d’Ettore Scola. L’Italie encore et toujours, qui tisse des liens amicaux entre hier et aujourd’hui, et célèbre l’irrévérence. Une autre manière de faire avancer le monde.
Les réalisatrices étaient largement à l’honneur en cette journée festivalière publique inaugurale. Dès 16 h 15, et jusqu’en soirée, le public pouvait notamment picorer en avant-première des découvertes signées de cinéastes espagnole (20 000 espèces d’abeilles d’Estebaliz Urresola Solaguren), britannique (How to Have Sex de Molly Manning Walker), française (L’Homme d’argile d’Anaïs Tellenne) ou malaisienne (Tiger Stripes d’Amanda Nell Eu), tout comme le nouvel opus de la transalpine Alice Rohrwacher, La Chimère. Une belle manière de partager avec les cinéphiles et néophytes des œuvres qui enchantent les festivals français et internationaux au gré des saisons, avant leur sortie en salle, et qui mettent en avant des héroïnes tenaces et vibrantes, elles aussi, dans toute leur complexité, et dans toute leur humanité.