Le nouveau Maccarthysme d'Hollywood
Elle est un tourbillon de rire, de bonne humeur et de plaisir. Quand Melissa McCarthy est arrivée sur les écrans, elle a amené avec elle une autre façon de voir les femmes à Hollywood. Décomplexée, féminine et gonflée, elle a bousculé les studios et nos habitudes, pour le meilleur.
Spy est à retrouver sur CINE+ A LA DEMANDE.
Melissa McCarthy, c’est d’abord un éclat de rire, celui qui la précède. Parce que la dame est drôle. Très drôle. De l’avis de ses réalisateurs et collègues acteurs, c’est même un rien gênant.
Pour les interviews de Spy, dans lequel elle joue à ses côtés, Jude Law était à deux doigts de se plaindre : « Il fallait qu’on joue les scènes sérieusement, ce qui est presque impossible face à Melissa. Elle va tellement vite, avec une intelligence folle : elle invente sans cesse, et en face on se retrouve perdu à se demander ce qu’on fait là ! ».
Ce à quoi l’intéressée rétorque : « Il est tellement gentil de dire ça… Faudra que je n’oublie pas de lui donner son chèque ».
L’actrice américaine est incapable de se prendre au sérieux. Ce qui ne l’empêche pas de faire son travail sérieusement. Son humour ? Elle en a hérité : « Mes parents sont très drôles et on aimait se réunir tous le soir autour du dîner. On se racontait notre journée et on essayait de faire rire les autres. Le rire a nourri ma vie, et j’essaye de transmettre cela à mes enfants aussi ».
Et depuis quelques années, son rire nourrit aussi nos plaisirs de cinéma. Si elle a commencé à la télé, notamment dans la série Gilmore Girls, c’est sur grand écran que son talent explose, en 2011, avec Judd Apatow.
Dans Mes meilleures amies, elle est Megan, jeune femme insatiable quand il s’agit des hommes, accro aux chiens. Et au milieu de cette bande, entre Maya Rudolph, Kristen Wiig et Rose Byrne, elle détonne déjà. Son personnage, elle le tient. Tellement, qu’elle n’hésite pas à aller très très loin, et que ça marche toujours. Car c’est là aussi le plaisir de Melissa McCarthy, qui n’a pas peur, loin de là, de jouer avec son physique.
Elle est ronde. Elle l’assume. Sans pour autant se transformer en pasionaria ou le revendiquer. Melissa McCarthy est avant tout une actrice.
C’est cela que Paul Feig, réalisateur de Spy, mais aussi de Mes meilleures amies et des Flingueuses, retient de ses trois collaborations avec elle : « Elle m’inspire ». Elle-même admet ne pas avoir de limites : « Avec Paul nous avons le même sens de l’humour, et on aime voir jusqu’où on peut pousser un personnage sans se retrouver à le casser. Et puis, peu importe ce que vous essayez, il y a toujours un filet de sécurité : la salle de montage. C’est quand même beaucoup plus fun. Et si ce n’est pas bien pour le film, alors ils ne le garderont pas ! »
Aucune limite, que ce soit dans un humour gentiment scato ou dans l’enlaidissement, Melissa McCarthy fait passer le rire avant tout. Et ça marche.
Les demoiselles d’honneur trash ont ouvert la voie à toute une nouvelle génération de comiques et des planches du stand-up où elle a commencé aux films, les femmes n’ont plus peur d’être drôles et parfois outrancières. Un constat que fait Paul Feig avec sa muse : « Je suis vraiment étonné de la façon dont on a interdit aux femmes d’être drôles dans les comédies. Elles sont devenues, au fil des années, le faire-valoir des hommes ; la maman qui les empêche de sortir, la copine sexy… Mais elle n’avaient plus le droit d’être drôles. Alors que si on leur en laisse l’opportunité… » Et le réalisateur de pointer Melissa McCarthy, qui acquiesce.
Voilà longtemps qu’elle ne se pose plus la question, elle. Les critiques, par contre, lui opposent encore parfois cet argument du « joli », comme elle le raconte elle-même. « On m’a dit, en gros, que je n’étais une bonne actrice que si j’étais apprêtée. Et que c’était une honte que les femmes ne soient pas jolies, parfaites, sur grand écran. » Pas de chance pour les critiques, la jeune femme n’a jamais eu de souci avec son physique et s’est toujours attaquée aux préjugés : « Je pense que c’est la société qui a un souci, qui s’attaque aux femmes sur des questions superficielles, alors qu’elles sont fortes et incroyables ! »
Dont acte.
Aujourd’hui, le box-office s’envole avec ce vent de liberté, et l’actrice et sa bonne humeur sont plébiscités… Aujourd’hui, la jeune femme du fin fond de l’Illinois, élevée par des fermiers catholiques, est invitée aux Oscars. Et comme elle n’avait rien à se mettre et que tous les designers ont refusé ses demandes de robes, faute d’avoir sa taille, elle a décidé de créer sa propre ligne de vêtements. Avec la dame, il n’y a pas de soucis, que des solutions.