« Ce qui m’intéresse, c’est d’enlever les couches successives de masques que l’on se crée pour révéler l’identité et l’intime ».
Olivier Roller est photographe. D’origine strasbourgeoise, il œuvre depuis une vingtaine d’années pour la presse nationale (Libération, Le Monde, Télérama…) et tire le portrait de figures célèbres du monde artistique, médiatique ou politique. À sa manière, frontale, brute et sophistiquée à la fois, il saisit des instants de complicité ou d’abandon, lors desquels ses modèles apparaissent souvent plus vrais que nature. Sous l’égide de l’éditeur Bruno Chibane (Chic Médias), un somptueux recueil d’un pan de ses clichés sort en librairie le 10 mars 2015, Visages. mise à nu.
» Ce portrait est le premier que j’ai réalisé hors de toute commande.
Depuis plusieurs années, je travaillais pour la presse et j’avais besoin d’approfondir ma relation au modèle, de ne pas être simplement dans le cadre d’une commande. Il fallait photographier ces personnes hors de leurs périodes de promo où ils donnent une image lisse et communicationnelle. J’avais suivi Jeanne Moreau dans un festival de cinéma en Belgique, avec François Ozon. On était tous les trois ensemble, elle était pétillante. De retour à Paris, je l’ai appelée pour lui expliquer que j’avais envie de la photographier, comme ça, pour rien, pour un travail futur mais encore inconnu. J’ai ajouté que je me sentais à l’étroit dans ce système de commandes, que je devais aller vers autre chose et que j’avais envie que ce soit avec elle. Elle a été d’accord et on a fait cette photo chez elle. C’était formidable car elle ne revendiquait rien. On a travaillé vers l’intérieur d’elle, à ce moment elle s’en fichait de son image. À la fin de la séance, comme une boutade, j’ai fait un autoportrait en me mettant à côté d’elle, c’était la première fois que je faisais ça, et c’est la couverture de ce livre à présent. Cette séance marque un point de rupture, un basculement entre une période où je faisais des choses parce qu’on me les demandait et une autre où je commence à travailler pour moi. »
Olivier Roller