Elle appartenait à tout le monde, mais ne ressemblait qu’à elle-même. Jane Birkin nous a quités le 16 juillet 2023.
« Quoi ? D’notre amour fou n’resterait que des cendres ? Moi, j’aimerais qu’la terre s’arrête pour descendre… » Dans On connaît la chanson d’Alain Resnais (1997), Jane Birkin était la seule à reprendre en play-back sa propre chanson, Quoi. Avec sa propre voix. Et là où le décalage prêtait à rire ou à sourire, lorsque Sabine Azéma entonnait Résiste avec la voix de France Gall, ou André Dussollier Vertiges de l’amour avec celle de Bashung, soudain, une émotion indicible s’emparait de nous. Dans ce jeu sur le vrai et le faux des sentiments concocté au scénario par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, la tessiture de la comédienne, entre grâce céleste et brisure imminente, apportait quelque chose d’inattendu et étonnant. Frissons dans le dos et larmes aux yeux.
Elle était unique, indomptable, magnifique. On l’a dite muse, et objet de désir. Jane Birkin, actrice et chanteuse anglaise était bien plus que cela. Désopilante face à Pierre Richard (La moutarde me monte au nez de Claude Zidi, 1976), bouleversante en fille perdue de Michel Piccoli (La Fille prodigue de Jacques Doillon, 1981), Jane Birkin, tout au long de sa vie a été elle-même et une autre. Emballée, emballante, elle s’est engouffrée dans des mondes. Michel Deville, Agnès Varda, Patrice Leconte, Jacques Rivette, Bertrand Tavernier… Androgyne et pourtant si féminine, engagée avec cet air de détachement, joyeuse malgré cette pointe de mélancolie légère. Tout ce qu’elle a inventé est inestimable. Il nous reste tant d’elle, heureusement. Avec en sus son humour inénarrable. Et puis son sourire.