Vétérans et découvertes excitantes sont au programme pour une sélection officielle qui s’annonce resserrée et équilibrée, entre diverses catégories, et une compétition qui accueille six femmes cette année, une première.
Après plusieurs années d’expérimentations, liées notamment aux contraintes dues à la pandémie de Covid, Thierry Frémaux pourrait bien avoir trouvé une forme d’équilibre avec cette sélection 2023. Légèrement resserrée et ordonnancée en différentes sélections plutôt cohérentes, elle fait envie à plus d’un titre.
Annoncées au cours des derniers jours, les avant-premières hollywoodiennes (Killers of the Flower Moon de Martin Scorsese, Indiana Jones et le cadran de la destinée de James Mangold), combinées à la présentation attendue en compétition d’Asteroid City de Wes Anderson, offriront quelques montées des marches glamour et donneront de la visibilité à une Sélection Officielle qui se permet quelques audaces, comme la présentation de deux films du documentariste Wang Bing, dont un en compétition, Jeunesse. Autre audace, mais qui ne devrait pas en être une, la présence de six réalisatrices en compétition, parmi lesquelles une habituée, Alice Rohrwacher pour La chimera, une revenante, Catherine Breillat, pour L’Été dernier, seize ans après Une vieille maîtresse, ou encore Ramata-Toulaye Sy pour Banel et Adama, l’unique premier film de cette sélection.
Concernant le contingent américain, Asteroid City, évoqué plus haut, sera accompagné par May December de Todd Haynes, et The Zone of Interest de Jonathan Glazer, première entrée en compétition pour ce cinéaste aussi rare qu’audacieux. Certains habitués ne sont pas là (ou pas encore, la sélection n’étant pas achevée), comme Cristi Puiu, dont on attend quand même avec impatience le nouvel opus au titre énigmatique, Mmxx. D’autres sont bien présents comme Hirokazu Kore-Eda, avec Monster ou Nuri Bilge Ceylan avec Les Herbes sèches. Du côté des vétérans, on avoue entretenir quelques craintes sur Perfect Days de Wim Wenders, dont on peut aisément préférer les documentaires inspirés (The Soul of a Man, Pina) aux lourdes fictions (Everything Will Be Fine, Rendez-vous à Palerme) depuis un certain temps, et The Old Oak de Ken Loach, dont le cinéma, certes généreux, ronronne depuis quelques années. De son côté, Nanni Moretti doit vraiment nous promettre Vers un avenir radieux (en salle le 28 juin) pour se faire pardonner Tre piani (mais notre bande diverge à ce sujet – voir ici notre « polycritique »).
Deux autres habitués seront à Cannes Première, Takeshi KItano avec Kubi, annoncé comme une comédie, et surtout, Victor Erice, qui revient après plusieurs décennies d’absence au cinéma avec Fermer les yeux, où l’on retrouvera notamment Ana Torrent, protagoniste du sublime Esprit de la ruche.
Comme l’a rappelé Thierry Frémaux, et ce grâce aux nouvelles sélections, Un Certain Regard a retrouvé sa mission de défricheuse de nouveaux talents avec pas moins de huit premiers films sur une sélection qui en compte seize. Pour parler brièvement de ceux que l’on connaît déjà avant de probables belles découvertes, on peut dire qu’on attend The New Boy de l’Australien Warwick Thornton, Rosalie de Stéphanie Di Giusto, après l’audacieux La Danseuse, et surtout Le Règne animal de Thomas Cailley, qui pourrait, tout comme Acide de Just Philippot (Séance de Minuit) nous donner un nouvel aperçu des hybridations entre cinémas d’auteur et de genre.