Disparu il y a un peu moins d’un an, Wes Craven, un des piliers du cinéma horrifique du siècle dernier, se voit offrir un hommage par la Cinémathèque française.
Démarrée mercredi avec, en ouverture, L’Emprise des ténèbres (en reprise également dans toutes les bonnes salles sous son titre original, The Serpent and the Rainbow), la rétrospective consacrée à Wes Craven se déploiera dans les salles de la Cinémathèque jusqu’au 31 juillet. L’occasion de (re)voir quelques-unes des pépites qui jalonnent la filmographie d’un des spécialistes de l’horreur US des années 1970-1980. Pas de grande surprise cependant : en dehors de sa filmographie en salles, seuls deux de ses téléfilms seront programmés. On ne pourra donc pas voir son épisode de La Cinquième Dimension, ni celui du Bar de l’angoisse. Pas plus que le porno The Fireworks Woman, qu’il aurait signé sous le pseudonyme d’Abe Snake. En revanche, les amateurs de la saga Scream et de celle des Freddy (l’intégralité de la série, dont ses deux films seront projetés) seront aux anges. Mais, bien que la création de Freddy Krueger soit une de ses grandes réussites, on ne saurait réduire sa filmographie à une franchise à succès. D’abord parce que le cinéaste a signé, avec Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper, deux des films les plus poisseux des années 1970 : La Dernière Maison sur la gauche, son premier film, relecture de La Source de Bergman, et La colline a des yeux, survival hanté par la figure de l’inquiétant Michael Berryman. Ensuite, parce que, comme ses contemporains John Carpenter ou George A. Romero, il a souvent insufflé un peu de subversion politique dans ses films. Ainsi des visions grinçantes des quartiers pavillonnaires dans Les Griffes de la nuit ou le trop méconnu Le Sous-sol de la peur, un de ses meilleurs films. L’Emprise des ténèbres, envoûtant film de zombies vaudou, se passe dans le Haïti en pleine révolution anti-Duvalier et La Musique de mon cœur, mélo avec Meryl Streep (eh oui !), illustre son penchant pour un cinéma social. Certes, sa filmographie comporte quelques éléments gênants, comme son film de loup-garou, Cursed, apparemment massacré par les frères Weinstein. Mais si on veut bien admettre que Craven n’a pas autant de style que Carpenter et qu’il n’est pas aussi mordant que Romero, il faut lui reconnaître une vraie intelligence dans le choix des sujets (il était souvent son propre scénariste) et une force pour créer des figures iconiques : on se souviendra longtemps du masque « munchien » des tueurs de Scream et du pull rayé de l’affreux Freddy Krueger. Une programmation estivale est finalement idéale pour ces films qui hantaient les cinémas de quartier et qui replongeront certainement quelques spectateurs dans la part trouble de leur adolescence.