Avec Quand l’improbable surgit, un autre futur revient dans la partie !, paru aux éditions La Mer Salée, Yannick Roudaut signe un passionnant essai, optimiste et pragmatique, et imagine les événements improbables qui pourraient faire advenir un monde plus juste et plus respirable. Il y explique, notamment, le rôle fondamental des fictions sur la psyché des spectateurs et leur impact sur le réel. Conversation avec cet ancien journaliste économique et financier, devenu auteur, éditeur et conférencier, qui consacre son énergie à la recherche d’un modèle économique durable et qui, depuis son enfance, entretient un goût prononcé pour le cinéma.
Midnight Express d’Alan Parker (1978). J’associe ce film à la phrase qui figurait sur son affiche accrochée au-dessus de mon lit pendant toute mon adolescence : « L’important est de ne jamais désespérer ». C’est une phrase-clé qui a influencé ma façon de vivre : je pense que, jusqu’au dernier moment, il ne faut jamais lâcher. Il peut toujours se passer un événement improbable qui change le cours de ce qui était écrit et qui fait qu’à la dernière seconde, on peut être sauvé. C’est cette philosophie de vie qui m’a incité à écrire ce livre pour dire aux jeunes : « Ne lâchez pas ! Tout n’est pas écrit. L’histoire n’est pas linéaire. C’est une succession d’évènements imprévisibles et improbables. Il va se passer des choses inattendues qui vont nous contraindre à bifurquer. »
J’ai commencé la rédaction de ce livre en juillet 2019 dans un café sur l’île d’Hoedic. Mon intention était d’écrire sur le pari de l’improbable face à l’effondrement. J’avais notamment rédigé un chapitre entier sur l’apocalypse. Je voulais expliquer que l’apocalypse n’est pas synonyme de catastrophe, c’est la révélation de quelque chose qu’on ne connaît pas encore.
Puis, quand le Covid est arrivé, j’ai mis quelques semaines à accepter qu’il fallait que je « casse » mon livre et qu’il me fallait axer mon texte autour de l’improbable.
À cette époque, j’achevais la lecture du livre de Jocelin Morisson et Romuald Leterrier Se souvenir du futur (Éditions Trédaniel), fondé sur les travaux du physicien Philippe Guillemant. Je me suis aussi passionné pour les écrits de Carl Gustav Jung sur les synchronicités, dans lesquels j’ai trouvé une clé pour avancer dans l’écriture de cet ouvrage.
Mon essai est structuré de sorte à créer une montée en puissance. La première partie, qui fait un état des lieux, est indispensable pour expliquer que nous sommes en train de changer de civilisation. Notre société dite moderne, basée sur l’hyperconsommation et la destruction du vivant n’est plus tenable. Et le modèle s’essouffle déjà malgré les résistances de certains. Je l’ai déjà écrit dans d’autres livres, mais il est important de le répéter, car beaucoup de gens n’en ont pas conscience. Ils sont convaincus qu’il n’existe pas d’alternative. Comme les sénateurs romains en leur temps qui pensaient Rome éternelle, ils ne se projettent pas dans une autre société, un autre monde. Et pourtant, nous ne vivons plus comme les Romains… J’ai la conviction que dans vingt ans, nous ne vivrons plus comme aujourd’hui. Notre monde se disloque. Pour les contemporains d’un monde, cette dislocation, suivie d’une renaissance, est inimaginable. Or, au regard des dégâts causés, en 2040 ou 2050, on ne pourra plus se ruer dans les magasins pour acheter des produits obsolètes qui détruisent la planète. Pour des questions de pollution et de pénurie de ressources naturelles, on n’aura pas le choix !
Cette première partie me permet ensuite d’aborder ce qui nous attend dans les prochaines années, tout en sachant que c’est l’inattendu qui surgira.
Je pense aux Temps modernes et au Kid de Chaplin, qui traitent de la misère sociale en temps de crise. Je pense, hélas, que nous plongeons dedans et que nous nous apprêtons à vivre des années très difficiles socialement. La crise sanitaire accentue un phénomène de paupérisation due à des décennies de libéralisme économique. Cela risque d’être très dur pour les plus démunis. Chaplin dénonce très bien cette violence sociale. Il met aussi en scène les débuts du productivisme et de l’hyperconsommation. Chaplin est un auteur qui m’a interpellé lorsque j’avais dix ans. J’avais fait un exposé sur lui à l’école et je l’ai toujours considéré comme un génie. Lors de mes conférences, pour décrire ce que pourrait être la prochaine crise, je fais souvent référence à Chaplin et aux Raisins de la colère de Steinbeck. Ces œuvres permettent de prendre conscience de ce qu’est réellement une crise sociale et économique grave : la misère, la soupe populaire, 25 % de chômeurs, des gens qui n’ont plus rien et qui vivent dans des cabanes avec des tôles ondulées ! En France, l’État est très protecteur et retarde la chute de certaines familles pauvres dans la misère. Mais dans le reste du monde, c’est déjà une réalité pour une part non négligeable de la population. Aux États-Unis, on estime que plus de 40 millions de personnes sont pauvres, contraintes de vivre dans la rue, des squats ou des caravanes. Ce qui est terrible, c’est que nous nous y sommes plus ou moins habitués, cela nous paraît « normal », tandis que des milliardaires polluent l’espace avec leurs projets délirants de constellations satellitaires pour recevoir le wifi en forêt amazonienne ! Le monde selon Jeff Bezos et Elon Musk, est un monde de technologie et de progrès, une fuite de notre humanité et une fuite du vivant. Ils nous emmènent vers un Metropolis 2.0 . D’un côté, une caste de Méta-Barons qui vivraient dans des résidences protégées (les libertariens), et de l’autre, 99% de l’humanité qui devraient travailler afin de se doter des moyens nécessaires pour survivre aux conséquences du dérèglement climatique (sécheresses, pénuries agricoles, inondations, tempêtes, violences sociales….). Le transhumanisme ne sauvera jamais l’humanité ! De nombreuses séries ont fleuri ces dernières années sur des humains augmentés grâce au transfert de la conscience ou à la reproduction de cerveaux en silicone. Ces répliquants (Blade Runner de Ridley Scott) sont un leurre, une diversion. Comme l’explique Jung, le cerveau n’est pas le siège de la conscience. Le corps et l’esprit sont indissociables. Considérer le corps humain et la conscience uniquement comme des algorithmes biologiques est à mon avis une erreur. Il est, par exemple, impossible de reproduire de manière artificielle la « psyché collective » dont parle Jung. Le psychanalyste explique que, lorsque nous arrivons au monde, nous sommes déjà connectés à des informations collectives logées dans une dimension qui nous échappe rationnellement. Entre nos expériences vécues et cette information collective, notre ADN se recombine. C’est l’épigénétique. C’est toute la limite du transhumanisme : on ne peut pas décoder l’intangible, l’invisible aux sens humains ! La vie ne se résume pas à un code informatique stocké sur une carte mère.
Le jour où l’humanité sera en capacité de sentir cette connexion invisible, de s’augmenter par la spiritualité et non par le numérique, alors nous aurons franchi une étape : cette révélation pourrait changer le cours des choses. Ce serait une apocalypse. En grec, καλύπτω / kalyptô est ce qui est caché, qui nous est inaccessible. Cette élévation des consciences ne peut venir que d’une révélation d’une connaissance encore inaccessible en 2021. Lors de la précédente Renaissance, un nouveau monde géographique s’est révélé à nous. Aujourd’hui, c’est un monde invisible qui pourrait surgir et nous permettre de grandir en humanité, de nous reconnecter avec le non-humain, la nature. Il me semble que nous sommes en chemin. Voyez l’essor de la méditation, du yoga, de l’animisme, et les découvertes de nouvelles particules comme le muon dans l’infiniment petit… Peut-être arrivera-t-il un jour où l’humain va comprendre qu’il fait partie d’un tout. C’est sûrement par l’observation de l’infiniment petit que nous allons comprendre l’infiniment grand. À la fin de mon livre, j’explique que Homo sapiens doit devenir Homo humilis, l’homme humble qui doit se reconnecter à l’humus, à la terre, pour lui permettre de grandir en humanité. Je suis convaincu qu’en 2050, les hommes regarderont notre époque actuelle comme nous regardons La Guerre du feu de Jean-Jacques Annaud aujourd’hui. On a l’arrogance de penser qu’on connaît le monde, mais on ne sait rien de la matière noire, par exemple, or elle représente 95% de l’univers. Ce qui me fait penser à Interstellar de Christopher Nolan. Ces films nous ouvrent la porte de l’humilité. Ils nous font comprendre que tout reste à découvrir.
Qu’est-ce que le temps ? Existe-t-il vraiment ? Plus j’avance dans mes réflexions et plus il me semble évident que passé-présent-futur n’est qu’une représentation occidentale du monde et j’espère que les intuitions de Guillemant sont justes. Il n’est pas à exclure que nos futurs sont déjà en partie déployés sous forme d’informations, au moment où l’on parle, que nos passés sont à côté de nous et que nous pouvons à la fois influencer le passé et le futur. Là où ces théories quantiques donnent de l’espoir, c’est qu’elles nous disent que nos actions dans le présent peuvent densifier un autre futur que celui de la fuite technologique et de l’effondrement climatique. Nos intentions seraient en capacité d’agir sur les événements à venir. Et plus nous excitons ce futur alternatif, désirable, plus nous recevons des informations, des signes, qui nous guident vers lui. Le futur influe le présent comme le présent influe le futur, sans que nous en soyons conscients. Cela nous responsabilise. C’est pourquoi il est important de rester attentif aux signes. Jung expliquait ainsi le phénomène des synchronicités : ce sont des traces d’un futur activé qui nous arrivent dans le présent et qui nous servent de guides.
C’est l’héritage du monothéisme et celui des Lumières. L’apparition du judaïsme, du christianisme, puis de l’islam, a coupé l’Homme de la nature. L’Homme est devenu un individu divin. C’est la fin de la déesse-mère et le début du patriarcat. Le mouvement des Lumières est allé plus loin avec l’idée d’humanisme, de capacité de l’Homme à progresser, à dominer la nature, la façonner. Puis la révolution scientifique a permis d’étudier le corps humain, de le disséquer. Nous nous sommes mis à tout expliquer de manière rationnelle. Cette écoute du corps et d’une psyché collective, d’un monde de l’invisible, a été perdue au fil des siècles. Les peuples animistes aujourd’hui ont encore cette capacité à se connecter à l’invisible, mais nous, nous l’avons perdue.
Quand on parle d’animisme, je pense à Avatar. James Cameron décrit un monde où l’humain vit en cohérence avec la nature. Il serait souhaitable de connecter nos technologies au vivant, d’arrêter d’exploiter les ressources fossiles et d’utiliser d’autres énergies non polluantes, tout en se tenant à une certaine frugalité. Ça, ce serait un vrai saut technologique.
Ce pas de côté me fait penser à La Belle Verte de Coline Serreau. Comme dans ce film, je crois que nos enfants nous regarderont rétroactivement en étant sidérés par nos choix absurdes. La jeune génération risque d’être en colère contre nous, tant nous aurons détruit cette enveloppe terrestre. Ce film arrive à montrer avec humour cette capacité à s’extraire du présent et à prendre conscience de ce qui est en train de se jouer.
Une partie de la jeunesse commence à s’éveiller aux questions climatiques et écologiques. Les confinements successifs vont accentuer la prise de recul sur notre inconscience collective et sur la futilité du productivisme. Beaucoup de gens n’en peuvent plus de travailler sans cesse devant un écran en télétravail pour produire davantage, sans bénéficier de loisirs en contrepartie. Cette prise de recul forcée sensibilise un grand nombre de personnes au fait qu’il est possible de vivre en consommant moins et en contemplant plus, comme dans Avatar ou La Belle Verte. Il faut réapprendre à contempler et à écouter le vivant. On a tout à y gagner.
Oui, et il va nous falloir basculer dans l’autre sens maintenant, sans pour autant redevenir des chasseurs-cueilleurs. Sauf à se retrouver dans un film- catastrophe angoissant comme La Route (réalisé par John Hillcoat) et à devoir trouver de la lumière et de la nourriture pour survivre !
Avant que l’Homme ne se sédentarise, il utilisait tous ses sens pour survivre dans la nature au milieu des animaux. Son odorat était plus développé, ainsi que tous ses capteurs sensoriels, comme les cheveux ! Une expérience réalisée auprès de natifs en Amazonie a prouvé que les chasseurs dont on avait rasé le crâne perdaient en efficacité. Les cheveux longs, courants au sein des peuples premiers ne sont pas un hasard : ils permettent de capter des informations, de ressentir des vibrations. Avec l’arrivée de l’agriculture et de la sédentarisation, nous avons perdu ces facultés et notre capacité à vibrer au diapason avec le vivant, car nous en avions moins besoin au quotidien. Nos gènes ont évolué. Par exemple, quand un tsunami approche, tous les animaux fuient se refugier et seul l’Homme reste sur la plage en contemplant la mer ! Nous ne sommes plus capables de ressentir une vibration dans le plexus, alors que tous les animaux ont perçu l’onde de choc. On en revient à l’épigénétique : la vie est efficiente, tout ce qui ne sert à rien est supprimé, nous nous sommes donc coupés de notre faculté à ressentir notre milieu de vie.
Aujourd’hui, l’enjeu des enjeux est de parvenir à retrouver notre vibration, notre animalité, pour arriver à vivre à nouveau avec la nature et à prendre soin d’elle. Beaucoup de gens éprouvent d’ailleurs le besoin de faire des bains de forêts. Le besoin de nature est flagrant à mesure que la société se numérise et se déshumanise.
Cette reconnexion doit se réaliser rapidement, tout au plus en vingt ans, pour arrêter le massacre environnemental. Cela dit, ce que je décris là est très occidental. D’autres cultures sont plus connectées que nous à la nature. La découverte des Amériques a changé le cours de l’Histoire. Mais si cela avait été une conquête du monde par les bouddhistes ou les Amérindiens, nous ne vivrions pas dans le même monde aujourd’hui. On voit à quel point l’improbable, comme cette découverte hasardeuse de Christophe Colomb, a tout changé.
Aujourd’hui, il peut encore se passer des choses imprévisibles, comme cette crise sanitaire qui pourrait nous faire changer de cap. 2020-2030 pourrait être une décennie où tout bascule, car l’effet systémique de cette crise est incroyable. Il est spirituel, philosophique, économique, social, politique, médical. Tout peut changer et cela a déjà commencé. C’est une grande bifurcation.
Notre rapport de domination de la nature me fait penser à La Controverse de Valladolid de Jean-Daniel Verhaeghe, écrit par Jean-Claude Carrière. S’y pose la question du droit de l’être humain d’exploiter ce Nouveau Monde en recourant à l’esclavage des Amérindiens. Ce film est très actuel, car nous aussi, nous devons nous poser la question des devoirs de l’être humain envers la nature. Cela a commencé grâce à des gens comme Valérie Cabanes, qui travaille sur les droits du vivant et la notion d’écocides, les crimes contre le vivant. J’ai également écrit un livre en 2013 sur ce sujet, La Nouvelle Controverse.
La première idée simple à développer selon moi est le crédit carbone individuel. L’idée est que notre carte de crédit, à chaque achat, fasse le lien avec la consommation de carbone dépensée. Un bon algorithme peut le faire. Si nous voulons tenir les accords climatiques de Paris et rester en dessous des deux degrés, il faut ne pas dépasser un certain tonnage au niveau mondial. Si chaque individu était alerté, au quotidien, de son niveau de dépense de carbone, on changerait le monde. Chacun serait responsabilisé sur ses dépenses en ayant conscience du périmètre à ne pas dépasser. Chaque année, mon quota de carbone à consommer serait revu à la baisse pour tendre progressivement vers les deux tonnes de carbone en 2050, soit la neutralité mondiale. La descente serait progressive, contraignante mais chacun serait libre de consommer ce qu’il veut. Et nous aurions tous le même quota.
Cette idée me fait penser au film Time Out d’Andrew Niccol. Les personnages y sont dotés d’un temps de vie. Le problème dans ce film est que les dirigeants possèdent un temps illimité, tandis que les ouvriers, eux, ont un temps de vie restreint et travaillent pour prolonger leur vie. On reste dans un système capitaliste inégalitaire.
Une autre idée : la frugalité. C’est la prise de conscience d’un mode de vie qui induirait du do it yourself, des low-techs, de la réparation, de l’économie de seconde main, des voyages restreints. Je crois beaucoup à la relowcalisation, un mélange de slow economy (lenteur) et de relocalisation pour plus d’autonomie.
Pour que ces idées deviennent évidentes, il nous faut de nouvelles élites politiques issues d’une jeunesse. Pour changer le monde, il va falloir que les plus jeunes entrent en politique pour œuvrer et faire valoir le sens commun.
Si on laisse la nature se reposer, si on ne touche plus à certaines zones comme un tiers des océans, des parcelles de forêts tropicales, pendant trente ans, ces espaces vont se régénérer. Il faudrait pour cela déclencher des subventions pour aider les entreprises et tous ceux qui dépendent de l’exploitation de ces zones naturelles. Une Banque centrale de la nature pourrait financer l’accompagnement. Le pouvoir de résilience de la nature est étonnant. On ne récupérera pas toutes les espèces disparues, mais on sera surpris. À cet égard la mini-série Chernobyl est intéressante. Ce qui s’est passé à Tchernobyl est la preuve que la nature sait reprendre ses droits après un accident nucléaire majeur. Et, bien sûr, chacun doit aussi prendre ses responsabilités au quotidien, en ne changeant pas de smartphone tous les ans, en raisonnant ses dépenses, etc.
Ce n’est pas un hasard si la Silicon Valley domine le monde aujourd’hui. Elle a été inventée il y a cinquante ans et influencée par les récits en vogue à cette époque. C’est parce que des auteurs de science-fiction comme Isaac Asimov, Ray Bradbury, Arthur C. Clarke ont imaginé un monde d’androïdes, de drones, de répliquants, que de jeunes ingénieurs ont donné vie à notre société numérique. Chacun puise dans son univers pour créer une fiction ou un objet. Ce n’est pas un hasard si Elon Musk rêve de conquérir la planète mars. C’est un rêve d’enfant véhiculé par les fictions américaines depuis des décennies. La Chine n’a pas créé le monde numérique. Il n’existait pas dans son univers créatif, dans ses récits, ses films. Elle a copié cet univers essentiellement américain dans un premier temps.
L’univers créatif, onirique, dans lequel nos enfants évoluent aujourd’hui va en partie nourrir notre réalité vingt ans plus tard. Si nous les biberonnons aux dystopies comme Walking Dead, Mad Max, Snowpiercer ou The Hundred, ils risquent de puiser dans cet univers d’enfant leur inspiration de créatifs adultes. Comme le souligne à juste titre Antoine Le Bos, fondateur du StoryTANK dans l’entretien que vous avez publié, un récit peut changer le monde, encore faut-il le nourrir d’idées positives, utopiques.
Pour que le monde de demain soit soutenable et désirable, il faut le montrer aux lecteurs, aux spectateurs. Il faut amener le futur dans le présent pour que ce futur se réalise. Il faut amener ce futur dans leur salon, dans leur intimité.
La force du récit est indéniable. Si le futur influe le présent et que nos intentions nourrissent ce futur, les créatifs, auteurs, scénaristes, acteurs et les producteurs, ont le devoir moral de proposer des fictions ou des documentaires qui nous permettent de toucher du doigt ce monde alternatif, humain et apaisé. C’est ce que nous essayons de faire aux Éditions La Mer Salée.
Cela demande parfois de l’audace vu qu’il s’agit de prendre un risque créatif, financier pour les producteurs et éditeurs, car la demande de ce type de créations est encore faible au regard du marché de la dystopie ! Il est plus facile de surfer sur la peur de l’effondrement que de miser sur un récit utopique. Et pourtant, avons-nous d’autres choix que celui d’imaginer un futur improbable, irréalisé ? Le prévisible nous assure la catastrophe. Misons sur l’inattendu.
À partir de là, j’attends des films lucides, mais ouvrant un champ des possibles sur nos capacités de vivre mieux, de relever les défis écologiques sociaux et économiques. J’ai envie de voir des acteurs et actrices engagés, non seulement à l’écran mais dans leur prise de parole quotidienne. Il nous reste un peu plus de dix ans pour infléchir la courbe climatique. Il est temps que ceux qui ont de l’influence sur nos citoyens prennent leur part de responsabilité et n’aient pas peur de se revendiquer comme engagés. L’engagement est une source de libération et d’épanouissement.
Côté décors, costumes, personnages, je résumerais mes attentes par trois mots : de la lumière ! Rendez-nous la lumière comme le chante si bien Dominique A.