Sandra (Léa Seydoux) partage son temps entre son emploi d’interprète-traductrice, l’éducation de sa fille Linn (Camille Leban Martens) et les fréquentes visites qu’elle rend à son père, Georg (Pascal Greggory), dont l’esprit s’évade progressivement. Au cœur de ce quotidien chargé, un doux hasard remet sur son chemin Clément (Melvil Poupaud), un ami perdu de vue depuis longtemps.
Léa Seydoux, « déglamourisée » pour l’occasion, laisse toutes les émotions de Sandra modeler son visage : la tristesse, la fatigue, la joie, l’amour charnel, l’amour filial, l’espoir, la colère, l’apaisement… C’est que ce personnage traverse une phase compliquée de sa vie. Veuve depuis des années, elle sent son corps se réveiller sous les caresses d’un amant qu’elle n’avait jamais envisagé ; une forme de résurrection qui intervient au moment même où le cerveau de son père s’éteint.
Avec son habituelle élégance, Mia Hansen-Løve met en scène les décisions douloureuses qui découlent de cette situation. « La vie n’est pas démocratique » souligne-t-elle, face à l’injustice de voir un parent brillant et charmant s’effacer, expérience qu’elle a vécue. Via l’interview minutée, la réalisatrice aborde le rôle consolateur qu’elle a octroyé à Nicole Garcia, mère de Sandra et ex-épouse de Georg. Une femme épanouie et volontaire, pendant heureux du personnage incarné par Isabelle Huppert dans L’Avenir (2016). Les méandres du système minuté l’amènent aussi à s’attarder sur la participation d’un vrai vétéran de la Seconde Guerre mondiale et, par association d’idée, sur celle de sa grand mère centenaire.
Le système minuté
Il s’agit de laisser jouer le hasard. J’ai arbitrairement décidé de noter ce qui se passe aux 7’, 42’, 70’ et 91’ minutes des films et de soumettre ces moments aux réalisateurs et acteurs venus en faire la promotion. L’idée est d’être vraiment très précise dans ces descriptions afin que mon interlocuteur puisse réagir au maximum d’éléments, selon ce qui lui importe le plus (le son, les cadrages, les couleurs, etc.). Le choix des mots a son importance également et il arrive que je me fasse reprendre, c’est très bien comme ça. Chacun s’approprie l’exercice comme il l’entend, mais au final on arrive presque toujours à parler du film de manière concrète, en contournant légèrement le train-train promotionnel. On pourrait dire que le résultat est à mi-chemin entre la bande-annonce et le commentaire audio, tel qu’on en trouve sur les suppléments DVD. Par ailleurs, ces entretiens sont « neutres » : que j’aie aimé ou non les films n’entre pas en ligne de compte, il s’agit avant tout de parler cinéma, sans a priori.