Que faire de l’héritage d’une mère blessée par la vie, qui s’est suicidée en laissant des cartons et des cartons de documents personnels ? Mona Achache, réalisatrice, est la fille de Carole Achache, photographe et écrivaine, elle-même fille de Monique Lange, éditrice et écrivaine. Carole avait consacré un roman à sa vie avec Monique, intitulé Fille de (2011, Stock) ; à son tour, Mona enquête sur sa mère, par le biais de son outil à elle, le cinéma.
Entre des murs d’abord vierges, Mona Achache invite Marion Cotillard à endosser le rôle de Carole Achache : transformation à vue de la comédienne et du décor, collages visuels et sonores, superpositions… Le puzzle prend forme, le récit se déploie.
Se prêtant au jeu de l’interview minutée, Mona Achache évoque certaines des lignes de force de Little Girl Blue : la volonté d’élargir la trajectoire de ces trois générations de femmes en quelque chose de plus vaste ; la compréhension qu’il ne s’agit pas d’une névrose familiale, mais bien sociétale. Avec pour but ultime de faire naître du beau du laid. « Je rêve d’un monde où plus personne n’aura honte d’avouer ce qu’il est ou ce qu’il a été », écrivait Carole Achache en conclusion de Fille de. Little Girl Blue œuvre à ce rêve.
Le système minuté
Il s’agit de laisser jouer le hasard. J’ai arbitrairement décidé de noter ce qui se passe aux 7’, 42’, 70’ et 91’ minutes des films et de soumettre ces moments aux réalisateurs et acteurs venus en faire la promotion. L’idée est d’être vraiment très précise dans ces descriptions afin que mon interlocuteur puisse réagir au maximum d’éléments, selon ce qui lui importe le plus (le son, les cadrages, les couleurs, etc.). Le choix des mots a son importance également et il arrive que je me fasse reprendre, c’est très bien comme ça. Chacun s’approprie l’exercice comme il l’entend, mais au final on arrive presque toujours à parler du film de manière concrète, en contournant légèrement le train-train promotionnel. On pourrait dire que le résultat est à mi-chemin entre la bande-annonce et le commentaire audio, tel qu’on en trouve sur les suppléments DVD. Par ailleurs, ces entretiens sont « neutres » : que j’aie aimé ou non les films n’entre pas en ligne de compte, il s’agit avant tout de parler cinéma, sans a priori.