Cannes 2021 et ses thématiques #4

La loi du désir

Retour sur les grandes thématiques qui ont traversé la passionnante 74e édition du Festival de Cannes.

Dans un monde gangrené par la pandémie, la distanciation sociale, le port du masque et les injonctions diverses, le Festival de Cannes 2021 a offert un large éventail de désir puissant. On a vu des pulsions cadenassées, de la frustration menant au geste inhumain du jeune Bruno Reidal de Vincent Le Port (Semaine de la Critique), à l’épanouissement muselé du héros détraqué du Nitram de Justin Kurzel (Sélection officielle, en compétition). Leos Carax témoigne d’une passion exclusive, débouchant sur la folie démiurge et meurtrière dans Annette (Sélection officielle, en compétition), et Julia Ducournau transcende le parcours d’une fille si meurtrie qu’elle en perd le goût bénéfique du désir dans Titane (Sélection officielle, en compétition).

Dans le marasme, l’être humain tente malgré tout de vivre son attirance, même condamnée par la loi, tel le héros dans l’Allemagne post-1945 de Große Freiheit de Sebastian Meise (Un Certain Regard), et telles les héroïnes, exultant d’épiphanie sexuelle dans la Toscane catholique du XVIIe siècle dans Benedetta de Paul Verhoeven (Sélection officielle, en compétition). La morale est bien vite balayée, comme dans Red Rockett de Sean Baker (Sélection officielle, en compétition), où le héros pornostar loser tente de mener les donzelles à la baguette de sa libido sous viagra.

Vivre son désir librement n’est pas toujours facile, car formaté par l’époque isolante des réseaux digitaux, que subit Cassandre dans Rien à foutre de Julie Lecoustre et Emmanuel Marre (Semaine de la Critique). Mais les héros assument pleinement leur corps dans la fresque japonaise Drive My Car de Ruysuke Hamaguchi (Sélection officielle, en compétition), d’après Haruki Murakami. C’est aussi la ligne de vie du parcours émouvant et épicurien de la presque trentenaire Julie (en douze chapitres) de Joachim Trier (Sélection officielle, en compétition), tout comme celle des jeunes à l’aise avec leur sexualité, face à une aînée rigidifiée par les abus passés dans Les Olympiades de Jacques Audiard (Sélection officielle, en compétition).

Vivre en accord avec soi-même, c’est apprendre à accueillir la découverte, comme la protagoniste des Amours d’Anaïs de Charline Bourgeois-Tacquet (Semaine de la Critique), qui alimente une aventure solaire et passionnée avec la femme de son amant. Un parcours initiatique nourrit le récit et les images d’Une histoire d’amour et de désir de Leïla Bouzid (Semaine de la Critique), où une fille apprend à un garçon la sensualité via les livres et la peau. L’adolescence voit naître l’attirance, fût-elle tronquée ou impossible, comme celle de l’héroïne amazone en butte au réel dans Murina d’Antoneta Alamat Kusijanovic (Quinzaine des Réalisateurs), et la sortie de l’enfance confronte le petit Johnny à une révélation existentielle et identitaire dans Petite Nature de Samuel Theis (Semaine de la Critique). Il faut de tout pour faire un monde !


Consultez les étoiles de la Bande sur les films en compétitions de Cannes 2021 !

Consultez le Palmarès de Cannes 2021 !