L’Ultima Spaggia
Le Pedocín, plage populaire de Trieste, possède une singularité : un mur y sépare en effet les hommes des femmes. Deux réalisateurs, le Grec Thanos Anastopoulos et l’Italien Davide Del Degan (qui y a passé une partie de son enfance), ont décidé d’y planter leurs caméras pour observer ce microcosme. De prime abord, cette entreprise, qui consiste à filmer un monde clos, sans porter de jugement, pour en observer les habitants, rappelle énormément le documentaire de Claire Simon, Le Bois dont les rêves sont faits. Mais on oublie vite le cousinage entre les films, tant les deux cinéastes nous plongent rapidement dans l’univers hors normes de cette plage coupée en deux. Alternant régulièrement les scènes féminines et masculines, les réalisateurs tissent une intimité immédiate avec les protagonistes de leur film. Et, miraculeusement, se façonne devant nous, de manière tellement évidente, une œuvre qui aborde quelques grandes questions agitant nos sociétés contemporaines. Celle d’une séparation sexuelle, bien sûr, ici entièrement voulue et circonscrite à ce seul lieu, mais aussi celle de l’identité, qui, à travers plusieurs témoignages, trouve une réponse souvent apaisée. Mais c’est surtout notre proximité avec les héros du film qui fascine : on a en effet, le temps du film, l’impression de partager avec eux quelques moments sur cette plage, éden moderne et populaire, miraculeusement coupé du monde, où il fait tout simplement bon vivre.