Saut à la corde, abdos, pompes : Toni (Royalty Hightower, une bombe), gamine de 11 ans au physique androgyne malgré ses longues tresses, s’entraîne régulièrement dans la salle de boxe où son grand frère a ses habitudes. Dans une salle voisine, des adolescentes, dont l’équipe championne de hip hop a pour nom « Les Lionnes », s’élancent avec force comme au milieu de l’arène (ou du ring), s’affrontent et dansent face à face en des « battles » endiablées, élégantes, envoûtantes. Peu à peu Toni n’a d’yeux que pour elles, qui sont déjà tout ce qu’elle n’est pas encore. Elle si petite, si timide, si silencieuse, les voit grandes, insolentes, volubiles. Et féminines, avec leurs discussions sur les mecs et leur maîtrise de l’eye-liner… The Fits n’est certes pas le premier (ni le dernier) film sur l’adolescence, mais ce court premier long métrage (72 minutes au garrot) est un modèle dans son genre. Quel genre au fait ? Car bientôt il bifurque vers l’étrange et le fantastique, nous invite dans une transe qui ne dit pas son nom (« fits » signifie « convulsions » ; mais peut aussi être entendu comme « ce qui se conforme ») et pose sans cesse des questions sans apporter les réponses. Dans une lumière saturant les couleurs et dessinant une ambiance de gymnases aux murs brique, de toilettes blanches et de passerelles grises, au son d’une mélopée dissonante et ensorcelante, The Fits saisit l’impalpable. Le mouvement des corps et cet imperceptible bouleversement qui s’appelle l’âge adulte, il enregistre les horloges internes et les rythmes externes en une chorégraphie passionnante de la vie, ses mystères et ses rites, ses vérités et ses illusions.