Venom

Les héros sont fatigués

Fruit d’une production tumultueuse, cette adaptation cinématographique d’un des plus célèbres antihéros de l’univers Marvel est un accident industriel exemplaire d’une volonté hollywoodienne de surfer à tout prix sur la vague des super-héros.

Depuis sa conception opportuniste au sein des studios Sony (bien décidés à rentabiliser la moindre miette de la licence Spider-Man) à la révélation récente que le film, d’abord envisagé pour les adultes, serait finalement destiné à des spectateurs adolescents, cette mise en images de l’antihéros Venom s’annonçait douteuse. On s’en souvient, le personnage était déjà apparu en antagoniste dans le Spider-Man 3 de Sam Raimi, mais, pour des raisons de droits compliquées chez Marvel, point de tisseur de toile ici et donc une nouvelle histoire pour l’introduire. Soit le crash d’une navette spatiale contenant des créatures extraterrestres, dont l’une d’elles va croiser, à San Francisco, le chemin d’Eddie Brock, journaliste incorruptible et conséquemment au chômage. Pour en arriver là, il faut près d’une heure de film, ponctuée de nombreuses invraisemblances et de personnages grossièrement définis. Mais le scénario, rempli de cratères, n’est rien en comparaison de la surprenante performance de Tom Hardy, qui se glisse dans la peau du héros avec la subtilité d’un pachyderme. Entre un jeu premier degré infantile et une désarmante désinvolture, la prestation du comédien, qui semble ne jamais vraiment y croire, est au diapason d’un film qui ne trouve à aucun moment sa place : trop violent pour un divertissement pour enfants et trop manichéen pour les adultes. C’est pourtant cette indécision, et quelques fulgurances du mauvais esprit du roublard Ruben Fleischer (Bienvenue à Zombieland30 Minutes maximum), qui donnent par instants à cet accident industriel singulier le charme des vieux films bis italiens fauchés qu’on croyait disparus depuis longtemps des grands écrans.