Comment la maladie d’Alzheimer d’une mère peut mettre en péril un couple. Ce premier long-métrage cosigné par Ann Sirot et Raphaël Balboni, tente des images poétiques pour conter l’irracontable. C’est poignant et même drôle, parfois.
Ce sont des petits riens, au début, une façon flamboyante de dépenser l’argent, d’offrir des cadeaux somptuaires. Puis des oublis, des confusions, des énervements aussi. Suzanne, directrice d’une galerie d’art et mère d’Alex, perd la boule. Sa maladie porte un nom ; elle l’atteint, elle, mais aussi son entourage, et en premier lieu son fils et sa belle-fille. Qui se retrouvent avec une maman sur les bras : fantasque, infantile et parfois ingérable.
Noémie et Alex, lorsque les premiers signes se déclarent, avaient décidé de faire un enfant. Alex, sombre et inquiet, débordé par l’émotion de voir sa mère dans cet état et la charge qu’elle représente au quotidien, souhaite remettre leur projet à plus tard. Tandis que Noémie, lumineuse et infiniment patiente, reste sur sa ligne et ses projets, ce qui ne l’empêche pas de recevoir et d’aider Suzanne.
Auteurs de plusieurs courts-métrages, Ann Sirot et Raphaël Balboni signent une fiction gonflée, sur un sujet peu engageant. Ils s’appuient sur des comédiens impeccables, Jo Deseure, impériale en Suzanne, et Lucie Debay et Jean Le Peltier, dont l’alchimie à l’écran est palpable. Ils déploient une belle énergie à capter le mouvement et réussissent un film vif, jamais caricatural. Ils s’essaient aussi à des métaphores visuelles, dont la poésie un peu appuyée ne fonctionne pas toujours. À l’image, lors des visites de Noémie et Alex avec Suzanne à la banque ou chez le médecin, soudain une uniformisation des vêtements et du papier peint évoque la maladie, qui grignote à la fois le cerveau de celle qui en est atteinte, mais aussi l’espace privé (et les nerfs !) de ceux qui l’aiment.
Car il est avant tout question d’amour dans Une vie démente, de ce qui, comme une évidence, se prodigue jour après jour et pallie la lente descente vers l’oubli d’une femme. La mort plane sans cesse, mais c’est un film sur la vie. Sur les ressources que l’on trouve (ou pas) pour continuer, s’adapter, avancer malgré tout.