Premier long métrage belge sur le harcèlement à l’école, Un monde, découvert dans la section Un Certain Regard à Cannes, va au-delà, dans le ressenti de très jeunes enfants. Et le nôtre.
Un visage de toute petite fille, elle pleure, elle ne veut pas aller à l’école. Elle rejoint la cour des grands où s’ébat déjà son aîné, elle entre en CE1. Son père l’accompagne, sa bouche à lui descend vers elle pour déposer un baiser dans ses cheveux courts, lui assurer que tout va bien se passer. Elle s’accroche puis finit par se jeter dans le grand bain… Et ce n’est pas si difficile au fond. Il y a des copines, on rigole à la cantine, petit à petit Nora se fait sa place. Et puis, son œil se pose sur son frère Abel, sur des plus grands qui le malmènent, sur cette violence qu’elle découvre, et tout se dérègle.
Premier long métrage de la Belge Laura Wandel présenté en sélection officielle à Un certain Regard, Un monde est regardé à hauteur d’enfant, épousant au plus près le visage de Nora que la très jeune Maya Vanderbeque incarne avec une justesse sidérante, gamine que l’on voit sous nos yeux ébahis et embués (il faut bien le dire) découvrir la cruauté du monde. Et ses conséquences. Les réflexions ostracisantes des autres enfants, la réaction bien intentionnée des adultes, la rupture dans la confiance entre frère et sœur… Tout ce qui, par effet domino, advient.
Ce que ce premier long métrage tenu de bout en bout nous dit du réel, sans jamais oublier de faire des images, d’être mouvement (courses, jeux, entrées et sorties de l’école) et son (les dialogues en off, les bruits de tous les enfants autour dans la cour de récré), est bien plus qu’un film à thèse, une théorie exposée sur grand écran —oui, on le sait, le harcèlement est un fléau—, c’est une immersion, un voyage dans des sensations qui, bien que d’aujourd’hui, nous ramènent à notre enfance, à nos souvenirs et nos ressentis. C’est douloureux et poignant. Indispensable.