Trois Amies d'Emmanuel Mouret

De la vie et des fantômes

Les liens se nouent et se dénouent. C’est tragique et c’est drôle. C’est signé Emmanuel Mouret, plus sombre qu’à l’accoutumée. Mais porté par trois lumineuses actrices.

Les liens anciens qui se dénouent, les liens secrets qu’il vaut mieux taire, les liens nouveaux qui pourraient adoucir la vie, les liens dont on rêve (au sens propre) et qui deviennent réalité… Emmanuel Mouret, en mettant en scène Trois Amies soit deux femmes mariées et une célibataire, magnifiquement et indéfectiblement soudées – explore tous les possibles.

À Lyon, dans des décors d’abord vides que nous présente un narrateur en voix off, trois jeunes femmes d’aujourd’hui vivent l’amour (bien ou mal) et en parlent (beaucoup). Joan (India Hair) se sent coupable de ne plus rien ressentir pour Victor (Vincent Macaigne), le père de sa fille, avec lequel elle rompt ; Alice (Camille Cottin) ne goûte pas les vertiges de l’amour, elle s’est installée dans un bonheur calme avec Éric (Grégoire Ludig), dont elle pense qu’il l’aime bien plus qu’elle ne l’aime ; celui-ci, pourtant, vit clandestinement une histoire avec la troisième femme de ce trio, Rebecca (Sara Forestier)… Ce ne sont là que les prémices d’une histoire dans laquelle tourbillonne sans fin la ronde des sentiments.

Après une incursion dans le drame contemporain (Une autre vie, 2013), puis dans le drame en costumes (Mademoiselle de Joncquières, 2018), le réalisateur de Laissons Lucie faire et Caprice continue à raconter l’amour et ses chemins parfois sinueux. Il le fait désormais, comme c’était déjà le cas dans son dernier opus, Chronique d’une liaison passagère (2022), avec moins de tonalités comiques et plus de nuances mélancoliques.

Il y a du drame dans Trois Amies : la mort, le chagrin font partie du film comme de la vie. Mais il y a aussi une bienveillance qui court entre les personnages, les relie, les tire vers le haut. Et nous avec eux. Entre vaudeville, fantastique (car il y a un gentil fantôme, que nous vous laissons découvrir), entre drame et comédie romantique, Mouret parcourt les genres et nous offre, en scope et en plans-séquences virtuoses, un film brillant, vif. Et très doux. L’élégance de la mise en scène est en accord avec celle des sentiments ici racontés. Et la lumineuse présence de India Hair, Camille Cottin et Sara Forestier est un atout majeur de ce film tout en délicatesse.