En adaptant librement l’ouvrage éponyme d’Emmanuèle Bernheim, François Ozon noue l’intime au romanesque. L’intime, car l’auteure y racontait son propre vécu, elle qui fut la collaboratrice du cinéaste, au scénario de Sous le sable, Swimming Pool, 5×2 et Ricky, et son amie. Le romanesque, car le réalisateur s’empare du réel et du texte de Bernheim, pour en faire un film de fiction sur le lien entre un père et une fille. Vingt ans après Sous le sable, voici donc un autre récit sur le deuil, qui se trouve être le vingtième long-métrage d’Ozon. Sa maîtrise, son expérience et sa maturité nourrissent cet accompagnement vers le dernier souffle d’une femme et de son paternel, décidé à choisir lui-même sa dernière heure. L’écriture est fluide. Le montage est précis. La mise en scène est simple et élégante. En évacuant le pathos pour s’attacher au cheminement d’une détermination – celle d’André – et d’une acceptation – celle d’Emmanuèle, l’aventure fait mouche. Ozon a atteint une assurance via trois propositions bigarrées (Grâce à Dieu, Eté 85 et celui-ci), qui enrichissent son regard sur le monde et sur l’humain. Après lui avoir fait un clin d’œil dans son opus précédent et sa scène de boite de nuit évoquant La Boum de Pinoteau, le cinéaste filme pour la première fois Sophie Marceau. Son incarnation est directe, ténue, vibrante, face à André Dussollier, qui se régale de sa partition, du visage à prothèse à l’assurance vers la mort, au milieu d’un casting à l’unisson de finesse (Géraldine Pailhas, Charlotte Rampling, Eric Caravaca, Grégory Gadebois, Jacques Nolot).