Dans The Guilty, le réalisateur d’origine suédoise Gustav Möller fait naître une tension croissante en filmant un comédien en huis clos et en jouant sur une bande sonore d’une très grande puissance évocatrice. Un thriller brillant !
Une femme victime d’un enlèvement appelle le 112. La ligne est coupée. Le policier qui a reçu l’appel n’a que son intuition, son imagination et son téléphone pour la retrouver.
Sur la base de cet argument, Gustav Möller, jeune réalisateur de 30 ans installé au Danemark, construit un thriller d’une parfaite efficacité. À l’origine de ce projet, une immersion dans un centre d’appels d’urgence et l’écoute d’un podcast, Serial, qui retrace une enquête sur l’assassinat d’une jeune fille. Soit une façon d’envisager la narration en faisant confiance au pouvoir évocateur du son et à l’imagination du spectateur.
La caméra ne quitte jamais Asger, le policier, filmé en plans rapprochés dans un espace clos, où ses collègues ne forment que de vagues silhouettes floues à l’arrière-plan, la plupart du temps. Le décor se compose de deux pièces contiguës dotées de bureaux, de postes téléphoniques et d’ordinateurs. Le visage Asger, qu’interprète l’acteur suédois Jakob Cedergren (révélé dans la mini-série danoise The Spider et vu dans Rage de Sally Potter, Terriblement heureux de Henrik Ruben Genz ou Submarino de Thomas Vinterberg) est l’écran dans l’écran où se lit tour à tour la culpabilité – le titre est l’un des rares indices premiers de cette histoire -, l’obstination et le désarroi. Le spectateur prend appui sur ses cheveux coupés court, son regard hanté, le pansement usé sur son doigt, ses tempes où apparaissent peu à peu des gouttes de sueur ruisselantes, pour mieux se concentrer sur le son qui, seul, constitue le hors-champ, où le drame opère au loin. Ainsi les voix des comédiens qu’on ne verra jamais (Jessica Dinnage, Johan Olsen, Omar Shargawi) font-elles entendre mille nuances émotionnelles qu’Oskar Shryver, le monteur son du film, mixe aux bruits du vent, de la pluie, de la circulation. Avec maestria. Chaque indice sonore, chaque inflexion vocale, chaque silence revêt un relief particulier. Voilà un film qui mobilise toute l’attention du spectateur et parie sur ses capacités d’écoute. On ressort essoré de ce récit, et épaté par tant de simplicité et de complexité combinées. The Guilty est la pépite cinéma de l’été !