Sparring

L’ouvrier du ring

Dans Sparring, Mathieu Kassovitz est Steve, boxeur de l’ombre prêt à tout pour payer un piano à sa fille. Un premier long-métrage signé par le comédien Samuel Jouy, juste et touchant.

 

C’est une histoire simple qui navigue dans des eaux pas si fréquentées par le cinéma. Car Sparring n’est pas un film de boxe au sens classique, mais un film sur un boxeur, dont le décor est davantage l’antichambre du ring que le ring éclairé lui-même. Un homme qui a raté plus de combats qu’il n’en a gagné, mais qui refuse de raccrocher les gants et s’obstine à l’effort. Pour payer une mutuelle à sa famille et offrir un piano à sa fille, il accepte de devenir le sparring-partner d’un champion, soit un partenaire d’entraînement, celui qui prend les coups face à la vedette adulée (que joue ici Souleymane M’Baye, ancien champion du monde de boxe anglaise).

Cet homme de l’ombre, courageux, battant, acharné, a l’énergie d’un héros, mais ni les atours, ni la destinée. Mathieu Kassovitz l’incarne avec une absolue justesse. Entraîné comme un grand sportif, il assume les combats du film. Le comédien a le don de jouer les héros ordinaires, de leur conférer une puissance mentale, de transformer la zone trouble dans laquelle évoluent ses personnages en espace de fantasmes romanesques pour le spectateur (la série Le Bureau des légendes, dont il est le centre, est délectable à cet égard).

Olivia Merilahti dans Sparring de Samuel Jouy. Copyright EuropaCorp Distribution

Face à lui, Billie Blain, dans le rôle de sa fille, est la révélation du film. Fille de l’acteur Paul Blain et petite-fille du cinéaste Gérard Blain, elle est dotée d’une présence remarquable et interprète cette enfant avec une délicatesse étonnante. Dans le rôle de sa mère, Olivia Merilahti est également épatante de tonicité et de vérité. C’est que tout sonne juste dans ce premier film à la facture modeste, mais digne : les comédiens, les dialogues, les situations imaginées par Samuel Jouy (acteur, il était l’un des séminaristes de la série Ainsi soient-ils). Le film fait la tournée des festivals, où il est fortement plébiscité – parmi lesquels le Festival International du film de Saint-Jean-de-Luz, où il fut montré pour la première fois en France, et tout récemment Premiers Plans à Angers. Ce n’est pas pour rien : il touche au cœur.