Silentium est un documentaire sur la vie de sœurs dans un couvent en Allemagne. Sobre comme une doctrine janséniste, le film de Sobo Swobodnik s’offre presque comme un haïku, comme une métaphore.
« Autrefois, se souvient, avec le sourire d’une grand-mère nostalgique, une veille religieuse qui approche les quatre-vingt-dix ans, nous étions plusieurs dizaines ». Aujourd’hui, il n’y a plus que cinq sœurs à Saint-Benoît, et quatre d’entre elles ont plus de soixante-dix ans. Autrefois, il y avait un atelier de broderie, un autre de fabrication d’osties. Tout s’est arrêté, faute de volontaires compétentes. Celles qui savaient encore sont mortes il y a longtemps. Et bientôt, inéluctablement, ce sera au couvent lui-même de disparaître. Des années qu’il n’y a plus de succession, et les cinq sœurs l’ont toujours accepté, sans résignation. Pour autant, rien n’arrête leur routine quotidienne, restée immuable depuis des siècles et qui sera identique tant qu’il restera au moins une religieuse pour perpétrer cet étrange sacerdoce joyeux d’épure, de fraternité et d’obéissance. Alors que la rationalité atteste de l’absolue vanité de cette entreprise, toutes continuent de croire en la nécessité de leur mission et de leur engagement, nous délivrant ainsi un précieux document sur l’inexplicable sacrifice d’une vie consacrée à une foi. Et, tandis qu’elles disparaissent, Sobo Swobodnik filme ce sobre tableau avec une image quasi monochrome où, dans un paysage où les murs sont blancs et les vêtements noirs, seul le brun clair des portes en bois typiques des habitations traditionnelles allemandes rappelle que le film est, à peine, en couleur.