Devant son pays en rébellion, un poète burkinabé entreprend à travers celui-ci un voyage en train et croise ses semblables, ses frères. L’humanité tout entière…
« Un jour, l’espoir se planta dans mon rêve », le poète burkinabé, Bikontine, traverse son pays du sud au nord, en train ou à pied. Il écrit dans un petit cahier bleu des mots déchirants, enluminés d’attentes ou de fatigue, qu’il lit en voix off. Il remet en question sa place d’écrivain, son rapport à son pays déchiré et en pleine récession, ce qui serait arrivé si Thomas Sankara n’était pas mort assassiné en 1987. Ce président progressiste qui voulait que ses compatriotes vivent « libres et Africains » et aillent, un jour, pourquoi pas, dans la lune est encore sur toutes les lèvres, son héritage malgré tout porte encore les habitants. Des images d’archives restituent l’utopie de ses discours qui aurait pu devenir réalité.
À Bagassi, Bikontine, découragé par toute la pauvreté qu’il croise et persuadé de sa propre inutilité d’écrivain, rencontre un médecin qui lui prodigue quelques soins, et surtout des paroles apaisantes et encourageantes. « Chacun fait ce qu’il aime le plus … Si ce que je fais ne me plaît pas, ça n’a pas de sens… C’est un travail de fourmi, le poète a sa part : il y a des gens qui mènent une vie très très très heureuse parce qu’ils ont lu des poèmes...»
Le temps file, les paysages défilent, les rencontres disent un pays debout malgré tout ce qui vous terrasse. Un cheval passe dans une décharge, un jeune homme joue au flipper et déclame des vers, des footballeurs s’ébrouent dans la poussière ocre, des chameliers passent indifférents au poète qui les regarde et se met à rire… Car à ce moment de son voyage, entre Ouagadougou et Kaya, il a dû descendre du train, les rails sont laissés à l’abandon et la voie ferrée s’arrête… Aux villageois croisés il demande pourquoi et découvre que depuis Sankara, les travaux n’ont pas repris, l’argent est parti ailleurs, dans de grosses machines…
La caméra documentaire de Lucie Viver restitue les couleurs et la fragile beauté d’un pays, la désolation, la fraternité et le courage de ses habitants. « Il faut travailler dur, il faut que ta sueur coule », dit encore un vieil homme au sourire d’ange. Et il ajoute en partant : « Il faut savoir vivre…».