Roulez jeunesse

À ne pas confondre avec la facétie de Jacques Fansten, portant le même titre, sortie en 1993 et menée par une brochette de seniors, cette fantaisie est un premier long métrage. Julien Guetta a déjà signé plusieurs courts, dont Le Vacant, primé à Clermont-Ferrand en 2008, et le récent Lana Del Roy (2016). Il est aussi scénariste, pour de nombreux courts, et pour les longs Le Petit locataire de Nadège Loiseau et Joueurs de Marie Monge. En coécriture avec Dominique Baumard, il s’est attaché à créer une comédie qui vire à l’émotion dramatique. C’est le portrait d’un quadragénaire dans le giron maternel – elle est sa patronne et il habite sur le même terrain qu’elle -, même s’il vit sa vie de grand garçon. Il voit son rythme existentiel chamboulé par la gestion forcée de trois gamins esseulés.

L’enjeu pour le réalisateur est la réussite de l’alliance entre les deux tons, avec progression du léger au grave. L’enjeu pour Éric Judor est le glissement du jeu vers le drame et les larmes. L’aventure séduit au démarrage, avec la description des journées et des clients du héros dépanneur, grâce à un montage initial bien vu. La création du garage familial charme aussi, avec l’alchimie des couleurs de personnalités et l’incarnation de Brigitte Roüan, Philippe Duquesne ou Maxence Tual. Du caractère enfin, par la présence de Laure Calamy, en assistante sociale et ex coup oublié d’Alex, avec sa coupe frisée et son chemisier à fleurs. Mais la colonne vertébrale faiblit en cours de route. Le passage vers la tension et la noirceur reste factice dans l’enchaînement, le montage, et la direction d‘acteurs des jeunes. Or, c’est l’enjeu du projet. L’arrivée lacrymale sent la mécanique, appuyée par les intentions, visibles, et la sauce ne prend pas pour saisir le vibrato émotionnel.