Dix-sept ans après Rivers and Tides (2001) qui avait connu un succès planétaire, Thomas Riedelsheimer retrouve avec un plaisir tangible l’artiste de Land Art Andy Goldsworthy dans un deuxième volet documentaire, Penché dans le vent, un film décoiffant et magnifique.
Malgré son calme apparent, Andy Goldsworthy n’a rien perdu de sa folie créatrice en pleine nature pour des œuvres belles et éphémères, à base d’éléments naturels : bois, feuilles, pierres, sur différents supports. Artiste de la couleur, il arpente le monde à la recherche de matériaux, tel cet argile brésilien qui semble unique à ses yeux. Mais il retourne toujours dans sa chère Écosse, pays dont la végétation surabondante et les tons balayés tour à tour par le vent, la neige, la pluie, le soleil, l’inspirent. Les années passant, les commandes pour des constructions parfois monumentales et toujours spectaculaires ont afflué d’un peu partout, du désert du Nouveau-Mexique, des forêts d’Australie en passant par les Alpes-de-Haute-Provence. Goldsworthy est un artiste mondialement célèbre, dont les tempes ont blanchi, mais – fait nouveau – il est assisté de sa fille, Holly, petite blondinette haute comme trois pommes dans Rivers and Tides, devenue une belle plante experte dans la pose de pétales de coquelicot sur les mains de papa.
Par-delà la beauté des œuvres d’Andy Goldsworthy, c’est l’évolution de sa pensée que le spectateur découvre, modifiée par les blessures et les aléas de la vie. Non seulement sa conception de la nature a évolué – elle englobe désormais la végétation cachée sous le béton des villes -, mais, de plus, l’artiste utilise davantage son corps comme l’élément d’un tout et de performances malicieuses. Dès qu’il le peut, dans telle cité, il s’étend ainsi avec joie sur les trottoirs, juste le temps nécessaire pour que la pluie dessine les contours de sa silhouette ; ou bien il traverse de part en part et de manière inattendue un buisson d’arbustes denses et noueux…. L’ensemble relève d’un comique de situation inédit allié au panache artistique, et la démarche de Goldworthy gagne encore en poésie : une manière superbe de montrer au spectateur combien l’artiste, littéralement perdu au milieu de la tempête et penché dans le vent, est capable de résister aux bourrasques et de trouver son point d’équilibre.