Fin du parcours mouvementé pour le film d’Andy Serkis. D’abord repoussé par la Warner pour cause de sortie du Livre de la jungle version Disney (signé par Jon Favreau), puis racheté pour Netflix, Mowgli : la légende de la jungle, lui aussi adapté de l’œuvre de Rudyard Kipling, a débarqué sur la plate-forme (et dans quelques salles britanniques et américaines, saison des récompenses oblige) pour les fêtes de fin d’année. Et ce choix de programmation s’avère finalement étonnant : si ce film s’adresse à un public assez jeune, son ton plutôt sombre n’en fait pas vraiment une friandise à consommer autour d’un verre de vin chaud en famille. Conçu par Serkis comme une adaptation un peu plus rugueuse du classique de la littérature enfantine, cette vision de l’œuvre de Kipling séduit, étonne et déçoit parfois dans ses choix esthétiques. Car sur le plan de la narration, on reste en terrain connu, le jeune Mowgli est entouré par la panthère Bagheera et l’ours Baloo et toujours confronté au terrifiant tigre Shere Khan. C’est, d’abord, plus dans une approche naturaliste de la survie dans la jungle que l’acteur fétiche de Peter Jackson se démarque des versions Disney. Ici, les animaux s’entre-tuent clairement pour survivre et se nourrir et la compétition est féroce entre les loups d’une même meute. Et c’est surtout dans la caractérisation des personnages d’animaux qu’Andy Serkis fait un choix aussi périlleux qu’audacieux. Là où Jon Favreau collait au plus près de l’esprit du film d’animation de Wolfgang Reitherman, Serkis fond les traits des animaux avec ceux des comédiens leur prêtant voix (Christian Bale, Idris Elba…), créant une sensation de malaise plutôt intrigante sur un projet pareil. Le comble étant atteint avec Baloo (auquel Serkis prête lui-même sa voix), ours rond de forme et de caractère chez Disney, ici vétéran défiguré par des griffures, guide mélancolique et grincheux, à l’image d’un film peu aimable et finalement surprenant.