Un voyage initiatique dans les contrées désertiques du Chili au travers la quête d’un jeune mécanicien croyant. Un beau film lucide au message universel.
Intimement persuadé de porter le Christ en lui dont il possède les stigmates depuis l’enfance, Michael, jeune mécanicien part au travers d’un désert de son pays, le Chili, pour retrouver un ami proche. Il a l’intention de sauver ce dernier en faisant un miracle…
Le réalisateur Christopher Murray n’est pas à son premier coup d’essai. Après un premier film de fiction remarqué (Manuel de Ribera en 2010), un documentaire (Propaganda en 2014) et la co-fondation du projet web Film Map of a Country (www.mafi.tv), il poursuit son exploration du Chili avec ce nouveau film, Le Christ Aveugle. L’essence même de son inspiration est tellurique, elle se ressent d’emblée dans les images soignées des décors désertiques de la Pampa del Tamarugal situés dans le nord du Chili, presque à la frontière du Pérou, là où se situe son action. A la manière du philippin Brillante Mendoza, lui soustrayant cependant l’esthétique des cadres tremblés tant ici ils sont ici solidement arrimés, Christopher Murray utilise les autochtones de ce territoire désolé comme des acteurs amateurs au profit de l’atmosphère d’authenticité qu’il recherche, proche d’un documentaire anthropologique. Il lui oppose avec beaucoup d’élégance, jouant sur les silences et les ambiguïtés, le thème de la croyance : en réalité, seule l’introduction du film fait véritablement état d’un postulat christique. Sous forme de flash-back agrémenté d’une voix off, il constitue l’unique concession à la fiction, un socle qui permet d’irradier le récit ; il est soutenu en cela par la présence envoûtante de l’acteur principal, Michael Silva au beau regard translucide, et à la participation active du spectateur, qui est suspendu au moindre détail d’une révélation. L’amour des hommes et des femmes qui perle spontanément de Murray et les histoires des destins en souffrance qui sont filmés, accompagnent un constat : l’instinct inébranlable qui perpétue la foi est à la mesure d’une indignation nécessaire face aux conditions de pauvreté que subissent chaque jour ce sous prolétariat. Au-delà du mythe, Le Christ aveugle témoigne ainsi de cette prise de conscience et du long chemin qu’il reste à parcourir en vertu de ce combat.