Une mère, une sainte ? Une femme, surtout. Un premier film classique avec Jeanne Balibar, ordinaire et magique, magnifique.
« C’est mon fils », répond-t-elle dans un demi-sourire, les yeux baissés sur son ouvrage, à une femme qui lui déclare : « Je vous admire ». Claudine n’a que faire d’être admirée. Elle est la mère d’une grand jeune homme handicapé, qu’elle garde à domicile, où elle travaille comme couturière. Sauf le mardi. Le mardi, elle monte à bord d’un bus, puis d’un train et se rend, de l’autre côté du barrage de la Grande-Dixence, dans un hôtel. Là, pour rien, pour le plaisir, elle choisit un homme, venu d’Angleterre, d’Allemagne ou d’Italie. Après une conversation polie centrée sur le pays d’origine de son interlocuteur, elle lui propose de monter dans sa chambre. Sans contrepartie. Pour le plaisir. Lorsqu’elle repart, elle dit merci…
Le personnage, jamais ne s’apitoie. Son amour pour son fils est inépuisable, il ne lui en reste plus pour les autres. Et pour elle-même ? C’est, en sourdine, la question que pose ce portrait, élégant et classique, au charme étrangement suranné, à la lenteur assumée. Le récit se situe en 1997, quand ni les portables, ni Internet, ni les réseaux sociaux n’envahissaient nos vies. C’est ainsi que Claudine peut faire envoyer des cartes postales à son fils par ce père absent depuis toujours… Ce premier long-métrage bénéficie d’un décor exceptionnel, les Alpes suisses. Et d’une actrice extraordinaire : Jeanne Balibar. Sa voix inimitable exceptée, elle se réinvente ici, comme à chaque rôle. Présence-absence, sourire en coin, douleur invisible, mais tangible. Elle est, par tous les pores de sa peau, cette femme un peu théorique. Elle la rend vivante, émouvante. Unique, comme elle.