Dans ce film venu d’outre Rhin, la petite histoire et la Grande se mélangent avec brio pour nous conter un pan de la pré-guerre froide souvent méconnu.
À Berlin, en 1956, le mur qui sépare l’Est de l’Ouest n’est pas matérialisé mais il est aussi réel que s’il l’était. À l’Est, la police règne, y compris dans les pensées et la jeunesse apprend à vivre sous le joug russe. Pas évident bien sûr, quand on est au lycée et qu’on est avide d’informations, de flirts et de discussions où l’on refait le monde, comme tout lycéen. Quand un entrefilet dans la presse évoque les révolutionnaires hongrois durement réprimés par l’armée soviétique, les lycéens veulent en savoir plus. Et en apprennent assez pour savoir qu’ils veulent leur rendre hommage : ils décident collectivement en classe d’observer une minute de silence en leur mémoire. Une minute de silence qui exaspère leur professeur et va remonter dans les méandres de l’administration. Les 19 élèves de Stalinstadt vont devoir apprendre la solidarité et la force face aux menaces.
La Révolution silencieuse met en lumière une période méconnue de l’histoire européenne, la façon dont elle va s’enfoncer dans la guerre froide, et ses conséquences sur une jeunesse qui se voit peu à peu privée de liberté et d’horizons. La façon aussi dont les choix de leurs parents vont changer leurs propres vies, sans se soucier des conséquences sur leur progéniture.
Par bonheur, le film ne s’arrête pas à un manichéisme souvent utilisé en force dans ce genre de cas : les bons ne sont pas si bons, les méchants pas si méchants et les « jeunes » et les « vieux » ne se bornent pas à deux camps distincts.
Chaque personnage est facetté et les relations entre parents et enfants notamment parviennent à échapper aux clichés habituels. Lars Kraume signe un film intelligent et humain, pas si prévisible qu’il ne le paraît de prime abord.
Et si le film n’échappe pas à un certain didactisme, reconstitution et histoire obligent, il n’en reste pas moins passionnant, parce qu’il conte la petite histoire et les toutes petites histoires dans la Grande avec beaucoup de sensibilité. Il est servi par un casting impeccable, dont les acteurs évitent le mélo et le sur-jeu, les jeunes en tête, avec une mention spéciale aux deux héros, Leonard Scheicher, Tom Gramenz, mais aussi à leur camarade de jeu Jonas Dassler. Gageons que ces trois là, jusque là peu connus hors des frontières allemandes, se feront remarquer.