C’est l’une des figures les plus fascinantes de la critique française de cinéma. Un homme d’une culture infinie et d’un charisme immense, qui fait vibrer ce portrait amoureux, signé Fabien Hagège, Guillaume Namur et Vincent Haasser.
Jean Douchet est un passeur. Un érudit, un passionné, un cinéphile perspicace. Et un bon vivant. Celui que toutes les cinémathèques et ciné-clubs s’arrachent, tant il est captivant d’écouter ses fulgurantes analyses filmiques, accepte d’être suivi par trois jeunes documentaristes qui ont croisé sa route, et font désormais partie de ses aficionados. Ces trois-là partent ainsi à la rencontre de la garde rapprochée du critique octogénaire : Arnaud Desplechin, Noémie Lvovsky, Xavier Beauvois, son fils spirituel, le producteur Saïd Ben Saïd, tous témoignent de leur attachement à cet homme, qui électrise celles et ceux qui l’écoutent et l’observent depuis plus de cinquante ans.
L’aura de Douchet et la singularité de son regard sont au cœur de ce documentaire, qui ne s’attache pas tant au parcours du monsieur (lire pour cela les passionnants entretiens avec Joël Magny dans L’Homme cinéma) qu’à ce qui le caractérise profondément. Car Douchet est un sensualiste, et son approche du cinéma l’est tout autant. L’homme est gourmand. Il faut le voir dévorer à table, s’émouvoir devant un bon vin, philosopher sur ce qui fait le sel de l’existence, évoquer son refus de la propriété. Douchet est un homme libre et l’écouter parler donne des ailes. On se s’attardera pas sur la forme un peu foutraque et l’esthétique sans le sou du documentaire, car il vibre malgré tout : il met en lumière un homme qui a compris que la vie et le cinéma interagissaient dans un vertueux mouvement de balancier, un homme à l’appétit insatiable qui a grandement contribué – et contribue toujours – à faire aimer le cinéma, et par extension, tous les domaines du vivant.