Bonne idée d’allier l’universalité de l’amour et du désir d’enfant à la représentation d’un personnage transgenre dans une situation extraordinaire. Dommage que, malgré le beau travail d’incarnation, le film emprunte autant le chemin du didactisme et parfois du simplisme.
A Good Man, un homme bien. Être un homme bien ne nécessite pas forcément d’être né dans un corps d’homme. C’est le cas de Benjamin, transgenre et pilier de cette histoire. Marie-Castille Mention-Schaar choisit méticuleusement les sujets de société des films qu’elle écrit, réalise et produit depuis quelques titres. La transmission par l’Histoire dans Les Héritiers, l’embrigadement djihadiste des jeunes filles dans Le ciel attendra, la transidentité aujourd’hui. Visant toujours le grand public et la vulgarisation, elle a bâti son scénario avec Christian Sonderegger, auteur du documentaire Coby, qu’elle a produit et qui suivait le frère transgenre de ce dernier, par ailleurs source d’inspiration de A Good Man, et à qui cette œuvre est dédiée.
Soit donc un couple, une histoire d’amour et un désir d’enfant. Banal et universel sur le papier, mais très singulier dans la situation d’Aude, femme cisgenre, et Benjamin, homme transgenre. Car la première est stérile, et le second, en attente de l’étape définitive de sa transition, peut encore tomber enceint. Le sujet est inédit dans la fiction française, mais l’auteure enfonce malheureusement le clou côté écriture. La démonstration explicative et didactique prend de l’ampleur au fil du déroulé dramatique, de l’envie de bébé à la grossesse de Benjamin. Sujet passionnant, mais traitement affadi aussi par la construction binaire des réactions collatérales. Le frère du héros est harmonieusement tolérant au départ, puis complètement réfractaire dans sa scène suivante, quand leur mère est présentée farouchement négative, avant de devenir miraculeusement complice.
Ces schématismes alourdissent le tout, même s’il y a de bonnes idées. Celle de situer l’action sur un territoire isolé, cocon recréé et détaché de l’historique du protagoniste et du duo amoureux, à savoir l’île de Groix en Bretagne, dont la cinéaste filme quelques autochtones vieillissants. Celle d’associer les actrices Noémie Merlant, excellente dans une partition casse-gueule, vue en amoureuse passionnée d’Adèle Haenel dans Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma, en désirante sans frontière genrée dans Les Olympiades de Jacques Audiard, et Soko, chanteuse et comédienne à la sensibilité tout-terrain, et impliquée dans la représentation queer. Celle d’inviter Jonas Ben Ahmed, acteur transgenre, pour jouer le second rôle de Neil, le livreur de courses. Les récits se diversifient et s’enrichissent. Gageons que les œuvres à venir seront pleinement abouties.