A découvrir en salles, une rétrospective de six films qui sont autant d’œuvres marquantes et forment une introduction au cinéma fiévreux et stylisé de Seijun Suzuki, maître, entre autres, du polar pop des années 1960.
Evénement : le terme n’est pas trop fort pour évoquer cette sortie (ressortie pour certains titres) en salles de films d’un cinéaste japonais aussi grand qu’il est encore mal connu, en dehors d’un cercle d’initiés fervents. A travers six œuvres (La Marque du tueur, Le Vagabond de Tokyo, Histoire d’une prostituée, La Barrière de chair, Détective bureau 2-3, La Jeunesse de la bête), on va enfin pouvoir découvrir ou redécouvrir sur grand écran le cinéma d’un styliste fiévreux, artiste génial qui s’est notamment illustré dans le polar au cours des années 1960. En effet, si le superbe mélodrame Histoire d’une prostituée n’appartient que de façon périphérique au genre criminel, la moisson de films proposés donne différentes images du thriller élaborées par le maître japonais, disparu, à 93 ans, il y a un peu plus d’un an.
Du polar pop mais encore assez sage Détective bureau 2-3 à La Marque du tueur, fantasmagorie délirante en noir & blanc, très éloignée des lignes narratives traditionnelles (qui lui vaudra d’être écarté de la puissante Nuikkatsu), Seijun Suzuki s’affirme comme un esthète radical travaillant la forme cinématographique avec une vigueur toujours stimulante aujourd’hui. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que des grands formalistes comme Takeshi Kitano, Jim Jarmusch ou, plus récemment Damien Chazelle, mais aussi Frank Miller, dans l’univers de la BD, se sont réclamés de Suzuki, qu’ils ont tous à un moment où à un autre cité dans leurs œuvres. Mais, on le sait aussi notamment grâce à HK Vidéo, qui avait en son temps sorti d’autres films du cinéaste (dont le très beau mélodrame Des fleurs et des vagues), l’immense talent de Suzuki ne se limite ni au polar ni aux années 1960. En témoignent par exemple des œuvres comme Brumes de chaleur (Kagerô-za, 1981) ou Yumeji (1991), aux antipodes esthétiques de son travail des années 1960, et pourtant elles aussi d’une stupéfiante beauté. L’engouement que suscite la sortie de cette première vague de films formidables se double donc d’un appel pressant aux distributeurs français : il faut sortir d’autres œuvres de Seijun Suzuki !