Après Le Pays des sourds, et Être et avoir, sur une école de campagne, Nicolas Philibert continue de documenter les chemins d’apprentissage. Ici, celui d’élèves infirmières et infirmiers. C’est vibrant, émouvant. Et tellement encourageant !
Elles arrivent en formation, sont jeunes et inexpérimentées, elles apprennent les premiers gestes de l’infirmière : se laver les mains. C’est si simple et si compliqué à la fois. C’est banal et follement drôle. Ce frottement long et minutieux de leurs mains l’une contre l’autre, elles le feront ensuite sans y penser, machinalement…
Ce que nous voyons, ce sont des gestes cent fois vus et répétés pour peu qu’on ait déjà fait un petit tour comme patient dans les hôpitaux : prise de tension, piqûre, placement d’un cathéter, découpe d’un plâtre… Mais ces gestes sont hésitants, timides, car voilà : pour qu’ils deviennent sûrs et efficaces, en un mot, professionnels, il faut en passer par trois années d’apprentissage.
Apprendre. La plus belle chose de la vie, ce qui nous mène et nous emmène, nous change et nous fait grandir, nous rend meilleurs dans l’absolu et dans le corps de métier choisi… Du B-A-BA au saut dans le vide, Nicolas Philibert suit ainsi une promotion de l’IFSI (Institut de Formation en Soins Infirmiers) de Montreuil, au long des trois années. Il ne choisit pas des personnages (majorité écrasante de femmes : infirmière, décidément, ne s’entend encore beaucoup trop qu’au féminin), mais plutôt des moments, forts, drôles, poignants.
Car avec les gestes il y a les sentiments, la peur de mal faire et de faire mal, la difficulté de toucher l’autre au sens propre, la timidité, l’impuissance face à la souffrance… Tous ces émois, ces yeux interrogateurs, ces mouvements donnent au film sa force et son ambition, car au-delà de portraits d’infirmières et infirmiers, De chaque instant (quel beau titre !) est aussi le portrait vibrant d’une jeunesse qui s’envisage et s’engage dans le soin à autrui et le don de soi.
C’est dire si le film, au-delà de sa plongée captivante dans un monde dont nous ne connaissons que la partie émergée, porte en lui sa dose d’espoir.