En tenue de soirée et toujours très attentive à sa mission de défricheuse de nouveaux talents, la Semaine de la critique ouvrait hier soir sa nouvelle édition cannoise 2018 avec un fort accent ricain et Wildlife – Une saison ardente de Paul Dano.
Acteur au charme singulier (Little Miss Sunshine de Jonathan Dayton et Valerie Faris, There Will Be Blood de Paul Thomas Anderson, Love & Mercy de Bill Polhad), Paul Dano est pour la première fois derrière la caméra pour ce film en parfaite harmonie avec l’image que l’on avait déjà de lui, douce, discrète, souvent méditative. Si le récit délicat adapté du roman de Richard Ford (Une saison ardente) est la chronique de l’amour qui se disloque entre Jeanette (impeccable Carey Mullingan) et Jerry (Jake Gyllenhaal) dans une Amérique sixties, Paul Dano a choisi de centrer son regard sur le fils, Joe (magnifique Ed Oxenbould), un adolescent impuissant face à la déroute de ses parents. Son visage poupin et lunaire ressemble à s’y méprendre à celui du réalisateur, accréditant d’autant plus l’idée d’une confession intime de ce dernier sur son enfance. Les séquences, aussi émouvantes que généralement rares au cinéma, traitant du désarroi d’un fils face au spectacle d’une mère dans les bras d’un autre que son père, sont les plus belles et les plus cruelles : ces fulgurances lorgnent vers la fougue et les brûlures de l’univers cinématographique d’Elia Kazan, grand-père de la coscénariste Zoe Kazan et femme de Paul Dano. Plus qu’un hommage relativement attendu aux toiles d’Edward Hooper, c’est bien ainsi à cet autre grand maître américain que Wildlife – Une saison ardente est esthétiquement redevable.