En 2009, James Cameron nous faisait découvrir l’univers des Avatars. À présent, il remet en scène Jake et Neytiri, désormais devenus parents de quatre avatars. La protection de la famille et de l’environnement tisse le fil conducteur de ce deuxième volet.
La paix aura duré une dizaine d’années sur Pandora, une lune de la planète géante gazeuse Polyphème. Suite au retour délétère des humains, l’avenir des Avatars et de leur écosystème se trouve soudainement compromis… Au-delà des spéculations entourant ce deuxième opus de la saga, telle la confuse estimation de son coût de fabrication à 400 millions de dollars environ ou encore ses pronostics gargantuesques de rentabilité, une certitude subsiste : Avatar 2 : la voie de l’eau est un film attendu. Peut-être même est-il le long-métrage le plus attendu de l’année à travers le monde.
Il faut dire que cette œuvre animée jouit de thèmes éminemment universels : la force du lien familial et de l’entraide, la beauté du monde animal et végétal ainsi que la nécessité de les préserver. Dans cette nouvelle histoire coécrite par James Cameron et Josh Friedman, l’action se déroule principalement chez les Metkayina, un clan d’Avatars vivant dans les récifs. Les Sully, une famille habitant initialement chez les Na’vi, y trouvent refuge pour fuir le colonel Miles Quaritch, qui veut leur mort. Le lieu est certes idyllique, sauf que tout n’y est pas rose. Les Sully devront dépasser certaines difficultés, à commencer par l’apprentissage d’aptitudes pour mieux se mouvoir dans l’eau, mais aussi et surtout respecter un peuple plein d’a priori et d’inimitiés à leur encontre.
Captivant, le film l’est indubitablement. Les studios Walt Disney ont par ailleurs décidé de le rendre encore plus attractif lors d’avant-premières aux conditions exceptionnelles. Ainsi, les Italiens profiteront-ils par exemple d’une projection sur les canaux de Venise, tandis que les Australiens verront leur célèbre piscine Bondi Icebergs transformée en panneau d’affichage géant, quand les New-Yorkais bénéficieront à Times Square d’un visionnage en 3D anamorphosé, et ce grâce à l’illumination simultanée de quarante écrans numériques.
Dès l’annonce de la sortie d’Avatar 2 : la voie de l’eau, les objectifs affichés étaient aussi nobles que complexes. Il s’agissait d’être à la hauteur de la technologie 3D et de combler le désir ardent de féerie du spectateur en lui faisant oublier des actualités peu réjouissantes. Enfin, James Cameron souhaitait en filigrane nous suggérer des idées de solutions aux problèmes actuels en invitant l’homme à développer l’empathie et le respect du vivant autour de lui.
Mais l’enjeu principal d’Avatar 2 : la voie de l’eau semble surtout être celui de l’immersion. La suite des aventures du héros Jake Sully porte une ambition aussi limpide qu’inouïe : nous faire visiter Pandora comme si nous étions nous-mêmes des Avatars.
Si visionner un tel décor aquatique en 3D n’équivaut pas (encore) à plonger notre tête sous l’eau, nous ressentons en revanche l’allégresse propre à toute nage, comme si nous voyions à travers les yeux du nageur, tantôt ébahis face à certaines créatures aquatiques, tantôt sereins devant un horizon bleu azur, tantôt foudroyés par un obstacle imprévisible. La voie de l’eau est celle de l’accès aux profondeurs marines, celle des déplacements astucieux puisque silencieux, invisibles et véloces, celle entrant dans nos poumons et nous noyant, celle qui nous épuise, tant la sortie est éloignée. Toutes ces voies traversent Avatar 2 et semblent s’unir à l’acmé du récit lors de scènes époustouflantes d’engloutissement.
Ici, la science-fiction n’invite pas à l’incohérence ou à la fausseté. Une impression d’authenticité se dégage de chaque être vivant, qu’il soit humain, avatar, animal ou végétal. Les peaux frémissent d’émotions, les tissus des habits se froissent, les yeux de l’animal en souffrance s’embuent. Grâce à la délicatesse de leurs expressions, les Avatars vont jusqu’à nous apparaître davantage humains que les hommes eux-mêmes. Si bien que les clichés propres aux romances hollywoodiennes disparaissent en étant interprétés par des avatars. Aussi, l’émoi de Lo’ak en présence de Tsireya échappe-t-il à la moquerie et suscite même l’empathie. Nul doute, nous sommes face à des adolescents.
Le naturel s’immisce également au montage grâce à l’entrelacement fluide de deux registres d’images en apparence opposés : la prise de vues réelles et la prise de vues animées. Grâce à l’adaptation de notre rétine, nous voilà les témoins de la coexistence de deux réalités dans un même espace-temps, puis de leur confrontation lors de la dernière partie.
En digne héritier des films d’action, Avatar 2 : la voie de l’eau met en scène des gentils et des méchants. De manière relativement tranchée, les Terriens y tiennent le plus mauvais rôle. Ce sont des personnalités assez caricaturales, des colonisateurs, qui, par l’appât du gain, pillent des ressources aux propriétés extraordinaires pour le bien de leur propre espèce. Des scientifiques arrogants reconnaissant l’intelligence des animaux de Pandora et des Avatars, tout en restant persuadés que leur supériorité technologique les mènera à la victoire.
Même si nous pouvons regretter que les points de vue propres à chaque espèce ne soient pas abordés dans leur plus grande complexité, l’espoir d’un approfondissement scénaristique dans la suite déjà annoncée de la saga tempère notre déception. Compte tenu de son ampleur, Avatar 2 : la voie de l’eau bénéfice de nombreux biais d’analyse et de réflexion. Toutefois, sa qualité la plus manifeste parait résider dans son regard porté sur la conscience non humaine. L’intelligence animale a rarement été aussi joliment démontrée par le septième art.
Hélène Robert