Gare du Nord
Cinquième long-métrage de Claire Simon, Gare du Nord représente la quintessence de son art. Passionnée par le documentaire dans lequel réalité et fiction peuvent se mêler, l’auteur de Sinon, oui (1997), Ça c’est vraiment toi (1999), Ça brûle (2006) et de Les Bureaux de Dieu (2008), nous montre – sous la forme d’un film presque choral – aussi bien les diverses activités propres à cette gare parisienne très dynamique (la première d’Europe, la troisième du monde) – que diverses séquences de fiction impliquant quatre protagonistes principaux, dont les pérégrinations vont se croiser : un spécialiste de la caméra cachée, qui recherche sa fille fugueuse, un étudiant d’origine maghrébine, qui enquête sur le terrain pour sa thèse de sociologie et qui s’éprend d’une prof de fac gravement malade, une titulaire d’un bac + 8, condamnée à travailler comme agent immobilier et qui a beaucoup de mal à concilier son travail et sa vie familiale chaotique… Ainsi tout ce petit monde s’agite-t-il de manière très quotidienne, mais est soudain confronté à des actions surréalistes, tantôt inquiétantes, tantôt amusantes. Le style du film est vif, tourné caméra portée, monté avec dynamisme, et interprété avec beaucoup de conviction par l’ensemble du casting. On est fasciné par l’acuité du regard de la cinéaste (qui cadre elle-même) et le constat final, celui d’une France de plus en plus américanisée, matérialiste, égocentrique, cynique, bref, à la dérive. Belle réussite.