Divines

Divines mais dangereuses

On l’a vu lors de la cérémonie de clôture, lorsqu’elle a reçu la Caméra d’or pour Divines, Houda Benyamina a du tempérament et elle manie le verbe d’une façon qu’on n’oublie pas. De fait, son discours revendicatif et musclé était à l’image de son premier film, présenté avec succès à la Quinzaine des Réalisateurs. On y suit Dounia, une adolescente qui vit dans une banlieue difficile. Toujours accompagnée de son amie Maïmouna, avec qui elle multiplie les incartades, la jeune fille se rêve le destin de Tony Montana dans Scarface. Elle pense avoir une chance de l’accomplir quand elle croise le chemin de Rebecca, redoutable dealeuse du quartier, qui accepte de la prendre sous son aile. Si le sujet et les protagonistes pourraient nous rappeler Bande de filles, le ton et le style, âpres et sans apprêt, nous font tout de suite comprendre que nous sommes dans un autre univers. Loin du regard de Céline Sciamma, qui magnifie des personnages qui la fascinent, Houda Benyamina adopte un style coup-de-poing, sans répit pour ses protagonistes ou pour les spectateurs. On ressent néanmoins immédiatement l’empathie qu’elle a pour eux, qui passe par une remarquable direction d’acteurs : Kevin Mischel, en danseur sensuel love interest de l’héroïne, Jisca Kalvanda, en impitoyable chef de bande, Déborah Lukumuena, comparse comique et émouvante, et surtout, la lumineuse Oulaya Amamra, qui porte ce film sur ses frêles épaules, avec audace et détermination.