Le Paradis
Libre. Alain Cavalier est libre. Affranchi des cadres, des formats, des obligations. Son cinéma continue de voguer au-delà des espaces balisés. Le Paradis, son dix-septième long-métrage depuis le premier Le Combat dans l’île, offre au spectateur de partager son regard enchanté sur le monde. Il ose la « dépression de bonheur » et recouvre les saisons qu’il filme de sa douceur. La douceur d’un regard farouchement humaniste, désencombré du jugement et du cynisme. Rien de naïf pourtant chez le réalisateur de L’Insoumis et de Thérèse. Juste un œil précis, vif, vigoureux, amoureux, sur l’être vivant, humain ou animal, sur l’élément naturel, sur le travail de l’homme et sur le travail du temps. Bricoleur inventif, ludique et généreux, il joue avec les mots, les formes, les objets et les jouets, comme avec les images qu’il monte avec fluidité et évidence du sens. Les associations d’idées le mènent à suivre la vie d’un caillou enserré dans des clous plantés au pied d’un arbre, tout comme à écouter des associations de mots, de symboles. Il évoque même les mythes et les origines en filmant des arbres, des champs. Cet essai poétique touche, amuse, intrigue. Cette réflexion sur l’humanité emballe. Ça ne ressemble à rien d’autre qu’à l’œuvre d’un franc-tireur inclassable. Un geste. Une respiration. Une heure et dix minutes à l’abri du chaos.