Une nouvelle amie
François Ozon renoue avec le mélodrame pour Une nouvelle amie, un film qui repousse les limites de thèmes qui lui sont chers : la différence et le regard des autres, l’inaptitude masculine à trouver sa véritable place, le deuil, la disparition et l’artifice. Inspiré par une nouvelle de Ruth Rendell pour la série Hitchcock présente, le récit suit Claire (Anaïs Demoustier), bouleversée par la mort de sa meilleure amie (Isild Le Besco), qui découvre que le mari de cette dernière, David (Romain Duris), se travestit. S’il évoque Crossdresser de Chantal Poupaud ou Bambi de Sébastien Lifshitz pour les questions relatives au genre, gageons que les manifestations du « mariage pour tous » auront aiguisé les arguments du cinéaste. Dans le contexte social aseptisé de nantis, l’ambition d’Ozon cherche autant à provoquer qu’à amadouer le public : le visage cristallin de Claire, fil rouge d’émotions variées et contradictoires face au « monstre » à deux têtes (David/Virginia), s’y prête parfaitement. C’est ainsi, sur les frêles épaules de Romain Duris, amaigri pour l’occasion et aussi laid qu’admirable, que repose tout le film. Qu’il se dandine maladroitement dans des robes aux couleurs criardes ou qu’il arpente les boutiques avec une grâce insoupçonnée, il est le centre d’attraction. Du rejet à la plus totale acceptation du spectateur, son interprétation décrit une courbe spectaculaire qu’Ozon suit pas à pas, tel un initiateur devenu admirateur, chantant comme Nicole Croisille dans le film : « Je me suis enfin senti(e) femme, avec toi ».