Ils courent, rencontrent des instances dépassées par leurs demandes, arrivent aux répétitions de leur groupe de chant où, pour cause de loyer impayé, la porte leur est fermée. Rien, pourtant, ne les arrête ; Hannah, Daniel et leur fils David sont portés par la musique : la première est chanteuse lyrique, le deuxième pianiste, le troisième violoniste. Ensemble, à Montréal, ils se battent pour continuer à faire entendre des compositions juives du XIXème siècle, dont il leur faut parfois exhumer des partitions fragiles et incomplètes… Beauté inouïe des moments musicaux, quête magnifique pour maintenir en vie un pan de mémoire qui sans eux s’éteindrait : ils sont « les seuls détenteurs de cette musique dans le monde ». S’il y a des conquêtes plus grandes aux yeux de certains, celle-ci est la leur, elle en devient unique et immense : « On ne peut pas perdre cette musique-là. », dit Daniel, comme un constat, une certitude, une nécessité. La caméra de Raphaël Nadjari (The Shade, Tehilim), mouvante et aux aguets, est toujours sur le vif, suivant les pas de Géraldine Pailhas, superbe en petit soldat menant toute sa troupe d’artistes conquérants (Luc Picard, Eleonore Lagacé et bien d’autres acteurs québécois surprenants), approchant les visages, épousant le visible (les corps) et l’invisible (les envolées de notes). Ce portrait d’une famille d’artistes, doublé d’une passation de savoir et d’amour d’une génération à l’autre est constamment vibrant.