Les nuits d'été
Dans la peau d’une femme, dans ses vêtements du moins – tailleur chic et chevelure ample –, un homme s’exprime sur ce qu’elle aime faire. La cuisine, le ménage. Nous sommes en 1959 à Metz et, même en se travestissant, Michel, notaire de Province dont l’épouse Hélène s’occupe de bonnes œuvres, reste dans une certaine norme. « Elle commence à me casser les bonbons, la bourgeoise », lâche Flavia, un autre homme habillé en femme. Dans cette maison de campagne, Michel vit en fraude sa passion découverte en compagnie de Jean-Marie / Flavia, alors qu’ils étaient au front, quinze ans plus tôt. De retour chez lui, il est parfaitement bien dans sa vie bourgeoise, notaire efficace, mari amoureux, père absent / présent. Sur un sujet casse-gueule, Mario Fanfani, après un premier long-métrage inédit chez nous, réalise un film sensible et juste. Portrait d’une époque où se mêle aussi le rapport à la guerre d’Algérie, portrait d’une génération charnière et sacrifiée, qui a plutôt regardé ses enfants se libérer en 1968, Les Nuits d’été ouvre des portes et révèle des désirs. Il le fait avec simplicité, évidence. Comme une chronique du quotidien, où les copains de week-end s’appellent Hermine, Fée Clochette ou Suzy Corridor, où une épouse rangée fait soudain un discours pacifiste, où la liberté s’insinue partout. La bonne idée du film, c’est le couple inattendu Guillaume de Tonquedec / Jeanne Balibar, son côté Monsieur Tout-le-Monde, son étrangeté à elle, font bon (et beau) ménage ; autour d’eux, la distribution est parfaite.