Pologne, décembre 1945. Une nonne demande l’aide de Mathilde Beaulieu, interne de la Croix-Rouge : au couvent, une jeune femme doit accoucher prochainement. Mathilde découvre bientôt qu’elle n’est pas la seule. Inspirée d’une histoire vraie, le quinzième long-métrage de la réalisatrice de Nettoyage à sec et Perfect Mothers s’attache à raconter la place des femmes dans la guerre, en opposant la tradition séculaire de bénédictines et la modernité d’une infirmière. Comme souvent dans son cinéma, elle observe avec acuité le corps féminin, mais ici le sujet est d’une force bouleversante. Car ces nonnes, violées par les troupes russes, sont mises face à une réalité nouvelle pour elle : de cette ignominie, de cette violence inouïe faite à leur être et à leur âme, vont naître des enfants, alors qu’elles se sont promises à Dieu et ont fait vœu de chasteté. Face à elles, Mathilde, émancipée, cultivée, politisée, est plus qu’un contrepoint, une alliée bienveillante. L’image douce et crue à la fois, passe d’immensités enneigées traversées de silhouettes noires et blanches, de chambres et de réfectoires hiératiques à d’autres lieux, tel celui de vie et de mort qu’est l’hôpital, ruche bourdonnante de bruit et de douleur. Servi par des comédiennes sublimes et sublimées, notamment Lou de Laâge et Agata Buzek, Les Innocentes parle d’hier et résonne en écho à tous les conflits de la planète qui saccagent la beauté, la pureté et la grâce.