Le Grand Homme
Retour en grâce de Sarah Leonor sur grand écran avec Le Grand Homme. Le rythme de montage lancinant de son premier film (Au voleur) s’accélère avec l’histoire de deux légionnaires, Markov et Hamilton (Surho Sugaipov et Jérémie Rénier), liés par une indéfectible amitié. Le premier sauve l’autre d’une embuscade en Afghanistan, avant de sortir de la Légion sans honneur à Paris. Dès lors, Markov retrouve son fils (Khadji) tandis qu’Hamilton se remet de ses blessures… Une citation en exergue indique que le film est inspiré du mythe de Gilgamesh, héros en quête d’immortalité, un écho au choc intime que la réalisatrice vécut lors de la disparition de Guillaume Depardieu (son comédien d’Au Voleur) et celle de son père. La mort délimite ainsi les situations et détermine les personnages dans ce film. Sarah Leonor propose une vision duelle du monde sans manichéisme. Les séquences enserrent souvent un couple (deux hommes, un homme et l’enfant) où rien n’est jamais figé. Au contraire, tout est affaire de substitution ou de faux semblants : Hamilton offre son identité à Markov, Hamilton hâbleur est au fond un enfant, Markov l’exilé n’est pas esseulé, le petit Khadji cache une grande maturité. Au travers des failles, des pudeurs et des éclats de ses personnages, Sarah Leonor donne une image élégante de la masculinité loin de ces « films de filles » dans l’air du temps. Le Grand Homme affine son modèle de héros déraciné, pétri d’indépendance, étanche aux normes, filant droit vers sa destinée.