Rarement film aussi monumental n’aura reposé sur une forme aussi simple et minimaliste. Derrière ses plus de cinq heures de projection, scindées en deux parties filmées avec les moyens dérisoires d’une caméra DV par le réalisateur Abbas Fahdel, Homeland offre rien moins que la redécouverte complète d’un pays et de ses habitants. En captant le quotidien de sa famille durant les trois mois précédant l’invasion américaine en Irak (Partie 1: Avant la chute), puis la lente déréliction du pays suite au renversement de Saddam Hussein (Partie 2: Après la bataille), c’est le contre-champ invisible des images médiatiques de l’époque qui nous est donné à voir, loin de tout cliché.
Il aura fallu plus de dix ans au documentariste pour se convaincre à monter ces images brutes, marquées par la disparition de son héros, son neveu Haïdar, fauché à onze ans par une balle perdue, comme il l’annonce dès les premières minutes de cette saga intime. De fait, chaque plan est marqué par la sidération et la tristesse de savoir qu’il n’est que l’ombre d’un temps à jamais perdu. Mais loin de n’en faire qu’un film-mausolée, Fahdel construit avec subtilité un documentaire majoritairement lumineux, où la trace des rires et des gestes d’antan devient le plus bel hommage à ses chers disparus, et à un peuple sacrifié par l’Histoire.