Tu dors Nicole
Comme dans un rêve éveillé, Nicole (charismatique et attachante Julianne Côté) va traverser l’été de ses 22 ans. La maison en banlieue de ses parents, qu’elle garde pendant leurs vacances, son frère débarqué là à l’improviste avec son groupe de musique, sa meilleure amie, un petit garçon trop adulte amoureux d’elle, ses désirs d’Islande… rien ne semble faire sens pour cette insomniaque sans cesse déstabilisée par le réel. Mais tout participe pourtant à construire un univers décalé, drôle et poétique : celui de Stéphane Lafleur, auteur québécois à l’identité de cinéma aussi singulière que cohérente.
Retrouvant en effet ce même thème de l’incommunicabilité, qui irriguait déjà ses précédents Continental ou En terrains connus, Lafleur parvient néanmoins à le dynamiser par un montage d’une rare précision, où s’arriment les uns aux autres les séquences les plus quotidiennes et les élans les plus fantaisistes, laissant s’établir une atmosphère nonchalante et joyeuse, tendre et ironique, portée en outre par la magnifique photo douce et laiteuse en noir et blanc de Sara Mishara.
Manquant peut-être par moments de transcendance ou de profondeur, Tu dors Nicole a pourtant la délicatesse d’une sieste au pied d’un grand arbre en été, le charme des après-midi indolentes passées au bord de la piscine, l’insouciance et la légèreté des nuages qui peuvent zébrer un ciel bleu d’azur. Un film que l’on pourra trouver un rien trop ténu, mais qui a, en réalité, le défaut de son immense et rare qualité : la pudeur.