Au bout du conte
Les années auront joué pour eux. Elles auront adouci leur image d’intellectuels bourgeois, bien-pensants et moralisateurs, auront fait entrevoir leurs doutes et leurs failles. Parlez-moi de la pluie, leur dernier film écrit ensemble, de ce point de vue, amorçait un tournant, laissait entendre que leurs certitudes ne demandaient, au fond, qu’à être chahutées. Au bout du conte avance un peu plus loin encore et propulse leurs silhouettes gagnées par l’âge au cœur d’un petit monde où l’artifice-roi se joue de ses habitants. Ici, les repères collectifs nourris de récits enchanteurs sont mis à mal. Avec eux, chacun vacillera, grandira. Agnès Jaoui convoque ainsi mère-grand et petit chaperon rouge, grand méchant loup au sourd parler et marraine bienveillante. Pour raconter, avec un humour lucide, que les contes de fées sont à la fois nécessaires et coupables, que si tout âge s’imprègne de leurs remugles, le combat a du bon. Car Au bout du conte est une comédie ombragée qui lutte contre le désenchantement. Son kitsch est souriant et son geste, vaillant. Le constat est certes cruel, mais la joie malgré tout demeure.