La playlist idéale

Felix Van Groeningen & Charlotte Vandermeersch

Invités d’honneur du Festival Music & Cinema de Marseille (dont Bande à part est partenaire), le cinéaste belge Felix Van Groeningen et sa compagne et collaboratrice, l’actrice Charlotte Vandermeersch ont partagé avec nous leurs musiques de cinéma favorites. Avec, entre autres, Georges Delerue, Nick Cave et même Britney Spears…

1. Georges Delerue, Thème « Catherine et Jim » de Jules et Jim (1962) dans Nos meilleures années de Marco Tullio Giordana (2003)

 

Felix Van Groeningen : J’ai redécouvert récemment la musique de Jules et Jim, par Georges Delerue, parce qu’elle a été réutilisée dans le film italien Nos meilleures années. J’adore les thèmes qui reviennent, comme les musiques chez Wong Kar Wai par exemple. Et c’est comme ça que Marco Tullio Giordana, le réalisateur, utilise ce thème dans son diptyque. C’est une mécanique éprouvée, mais qui fonctionne parfaitement. Et lorsque c’est très bien fait, comme ici, c’est formidablement émouvant.

2. Shigeru Umebayashi, « George’s Waltz » dans A Single Man de Tom Ford (2009)

 

FVG : J’ai énormément écouté cette musique. C’est grandiose, il y a des violons et ça emporte tout, j’adore. C’est profondément émouvant et mélancolique. J’écoute souvent des bandes originales comme celle-ci, pour entrer dans l’écriture d’un film. Ça m’aide beaucoup.

3. Nick Cave & Warren Ellis, « Song for Bob » dans L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford d’Andrew Dominik (2007)

 

Charlotte Vandermeersch :  Toute la musique de ce film est très belle. J’en ai utilisé une partie dans une pièce de théâtre : c’était une adaptation d’un grand roman russe et je cherchais des mots à chanter. Alors, j’ai mis des mots russes sur un des thèmes de L’Assassinat de Jesse James. Et ça fonctionne très bien. Ce n’est pas une musique de western. Elle est complètement hors du temps.

 

4. Mica Levi, « Lipstick to Void » dans Under the Skin de Jonathan Glazer (2014)

 

CV : Ce qui est très réussi dans cette B.O. de Mica Levi, c’est que la dimension extraterrestre du film de Glazer est présente au cœur de la musique. Et en même temps, cette musique est très humaine par sa dimension mélancolique. Avec cette mélancolie, la musique nous prend par la main et nous aide à accepter tout ce qu’il y a de bizarre dans le film.

5. Foreigner, « I Want to Know What Love Is » dans Fucking Åmål de Lukas Moodysson (1998)

 

FVG : Ce tube des années 1980 est utilisé avec génie dans ce film, et ça m’a beaucoup inspiré. Fucking Åmål raconte une histoire d’amour entre deux filles. Elles viennent d’un petit village, Åmål, et elles veulent partir à Stockholm. Un automobiliste les prend en stop et lorsqu’elles entrent dans la voiture, il y a ce morceau qui passe. Lorsqu’elles referment la portière, la musique devient beaucoup plus présente : ça part du réel et ça devient une vraie B.O. C’est très romantique, un peu cheesy, mais ça fonctionne, parce que ça part du réel. Alors, elles s’embrassent, et le mec coupe la radio, se met à les engueuler, il ne veut pas de filles qui s’embrassent dans sa voiture. La musique s’arrête, retour brutal du réel. J’aime beaucoup quand la musique part de quelque chose dans le film, et puis enveloppe tout. Ça me fait penser à cette scène absolument géniale dans Spring Breakers, lorsque James Franco, avec ses dents en or et son look de gangster, se met à chanter du Britney Spears au piano. Il est entouré de filles avec leurs cagoules et leurs armes, et soudain, la voix de la musique originale, celle de Britney Spears se superpose à la voix de Franco…

 

CV : C’est une idée géniale : prendre une chanson que tout le monde connaît, mais la mettre là on ne l’attend pas, pour créer autre chose. Ça donne une scène inoubliable.

 

BONUS. Britney Spears, « Everytime » dans Spring Breakers de Harmony Korine (2012)

 

« Comme on est à Marseille, je suis obligé de donner cette musique en référence à notre idole à tous, JuL ! Ce morceau, La Bandite, sublime une séquence magistrale de BAC Nord, la plus belle scène du film [Il s’agit d’une séquence en voiture, lorsque les policiers ont interpellé un jeune d’une cité, tout excité d’entendre JuL à la radio, ndlr]. »