Les bruits bruissent, c’est bien normal, on n’en attendait pas moins d’eux. Le gouvernement annonce la réouverture des lieux de culte pour le 1er décembre, si les chiffres de contamination le permettent.
Heu ? Play it again, Germaine ! Et notre culte à nous, spectateurs assidus, amoureux ou cinéphiles, on en fait quoi ? La salle et ses velours, ses murmures, sa chaleur humaine (oui, même un siège sur deux), son écran géant, ses regards entendus au-dessus du masque lorsqu’on en sort heureux d’avoir partagé ces quelque cent deux minutes de bonheur ensemble, même séparément ? La salle où, on l’a dit et répété, on ne craint rien du tout : assis, masqués, muets, isolés. Regardant tous dans la même direction.
Certains évoquent la réouverture des cinémas pour la mi-février, d’autres pour la mi-décembre, en fait on ne sait rien, on sait juste qu’on a envie, très envie de retourner dans le noir qui est lumière et projette sur nos vies et nos âmes des rêves et des peurs, des horreurs et des tendresses, d’infinies beautés pour rire et pleurer.
En attendant ce jour où nous retournerons au cinéma, ce jour où, comme si nous avions gagné à la loterie, nous nous écrierons, tel Aimos dans La Belle Équipe : « À nous la belle vie, le caviar et les morues ! » (citation merveilleuse et totalement politiquement incorrecte en 2020 de ce film de 1936 signé Julien Duvivier, avec Charles Spaak aux dialogues). Et pour étancher une envie soudaine de liesse, de convivialité, de verres qui s’entrechoquent, revoir ce film éternel, ce rêve d’amitié, de solidarité et de guinguette au bord de l’eau. Même s’il finit mal, même si c’est à cause d’une femme, même et surtout parce qu’on ne ferait plus un film comme ça aujourd’hui… « Va chercher du mousseux d’renfort ! », lance Gabin à son pote devant la foule des voisins qui s’amassent pour boire un coup à la santé des cinq copains. Du mousseux d’renfort…