Souvent le spectacle est aux marches du Palais, Thierry Frémaux accueillant les invités, les ouvreuses attentives, et Sharon Stone en majesté et en robe de princesse.
C’était hier soir, inopiné, inattendu. Une ovation l’a accompagnée : Sharon Stone qui a toujours su faire le show sur les marches (en 2002, alors qu’elle était membre du jury, elle illuminait chaque soir de sa présence tapageuse et magnifique), en ce 14 juillet, a encore gravi un cran. Cheveux blonds courts et hérissés et robe de tulle bleu parsemée de grosses fleurs. Un spectacle à elle toute seule, rencontre de la modernité et du romantisme, quelque chose d’un film en-chanté rappelant l’univers de Jacques Demy. Une robe couleur du (prin)temps.
Dixième jour et antépénultième, il y a comme une impression d’engouffrement, d’entonnoir où les films viennent s’étrangler dans l’étroit goulet de nos mémoires. Sans compter tout ce qu’il y a à voir par ailleurs, trois films en compétition hier, cinq à suivre dans les deux jours qui viennent. On sait où sont les masques (sous nos cernes !), mais où donc est la Palme ? Ildiko Enyedi, troisième femme en lice avec L’Histoire de ma femme, offre en sept chapitres et pas mal de longueurs (2 h 49, tout de même) un film léché, décoratif, et un peu suranné. Avec Léa Seydoux —omniprésente dans les films (4 en tout) mais absente sur les marches pour cause de covid contracté sur un tournage— et le très juste et charismatique acteur néerlandais Gijs Naber… Quant à Jacques Audiard, il signe Les Olympiades, film intimiste sur les nouveaux discours amoureux, ou « la jeunesse d’aimer » comme écrivait Aragon. Dans un sublime noir et blanc lumineux signé Paul Guilhaume (Petite fille, Ava) le film charme par la grâce de ses acteurs (Lucie Zhang, Makita Samba, Noémie Merlant) et séduit, sans envoûter vraiment.
Dans le même temps, la Semaine de la Critique s’est terminée hier et le jury présidé par Christian Mungiu a rendu son Palmarès (Grand Prix à Feathers, de Omar El Zohairy, nous y reviendrons) avant la projection du très beau deuxième long de Leyla Bouzid, Une histoire d’amour et de désir. Avec, décidément, de la jeunesse et du sentiment : Love is in the air…. Alors que certains bureaux commencent déjà à plier bagage (« Il faut tout plier, tout peut se plier, tu t’enfuis déjà… » disait Pierre Desproges, paraphrasant Ne me quitte pas de Jacques Brel), et que les images du cinéma se catapultent et se répondent, nous hantent et nous habitent, il reste trois jours. Tous les miracles et toutes les découvertes sont encore possibles. Ouvrons grand les yeux…