En attendant la première réalisatrice en compétition ce dimanche (Les Amandiers de Valeria Bruni-Tedeschi), petit florilège exclusivement féminin dans les autres sections.
Dans tous les jurys, les femmes sont là et bien là. Rossy De Palma préside celui de La Caméra d’or, Valeria Golino celui d’Un Certain Regard et Kaouther Ben Hania celui de la Semaine de la Critique. Quant au « Grand » jury présidé par notre Vincent Lindon national, il se compose de quatre belles grandes actrices de caractère, qui ont plus d’une corde à leur arc (de gauche à droite sur la photo) : Jasmine Trinca (qui présente ce soir même en séance spéciale son premier long, Marcel !, nous y reviendrons), Rebecca Hall, Deepika Padukone et Noomi Rapace.
« Je ne suis pas une femme cinéaste, disait Agnès Varda. Je suis une cinéaste. » L’une des salles du Palais des Festivals, inaugurée en 2007 et jusqu’ici appelée « Salle du Soixantième » (comptez sur vos doigts, vous comprendrez pourquoi), porte désormais son nom. La face du monde n’en sera pas changée, et cette nouveauté ne concerne que les quelque 38 000 accrédités du Festival de Cannes, mais le geste est joli, il a du sens : deux réalisateurs – Louis Lumière, Luis Buñuel – et un critique de cinéma – André Bazin – avaient la leur. La réalisatrice de La Pointe courte, venue de nombreuses fois sur la Croisette, notamment avec Cléo de 5 à 7 en 1962 et Jacquot de Nantes en 1991, méritait bien de la patrie. Et déjà, quelques camarades journalistes internationaux, de Hongrie, du Canada et d’ailleurs, qui s’échinaient depuis quinze ans à prononcer « Souâsssant’ chièmeuh ? » sont très contents. Elle est pas belle, la vie ?
C’est sous le beau titre Jane Campion, la Femme cinéma que Julie Bertuccelli (Depuis qu’Otar est parti, Dernières nouvelles du cosmos) a présenté – dans la sélection Cannes Classics – son documentaire consacré à la seule femme récipiendaire de la Palme d’or du Court Métrage (Peel, 1986) et du Long Métrage (La Leçon de piano, 1993). Ce film de montage alterne images des œuvres de cette « anthropologue passionnée par l’identité féminine » et extraits d’interviews ou master class. Sans autre commentaire que la parole (simple, directe, passionnante) de Jane Campion. Utiliser les archives, laisser les images s’exprimer, ne pas ajouter de redondances, c’est l’idée maîtresse et courageuse de ce beau film humble, qui n’a qu’un défaut : il nous donne envie de revoir tous les films de Jane Campion. Oui, c’est vrai, c’est aussi une qualité. Mais là, tout de suite, on n’a pas le temps !
C’est dans le monde très macho de la moto et du cross-bitume que se situe Rodéo de Lola Quivoron, premier long présenté à Un Certain Regard. L’histoire de Julia (Julie Ledru) passionnée de « bécanes », qui les vole à qui en a une, n’hésite devant rien et croise la route d’une bande de mecs. Hâbleurs, voleurs, dirigés depuis la prison par un dénommé Domino, les « B. More » ne la voient pas du tout arriver d’un bon œil… Même si le film souffre d’un rapport mal défini au magique et au vaudou, il n’en reste pas moins une œuvre sidérante, jetée, crachée presque, sur une jeunesse rageuse et désespérée. Rageuse parce que désespérée.