Le cinéma est l’art des fantômes. Faire exister ce qui n’est pas, recréer ce qui n’est plus. C’est le cas cette année plus que jamais, comme si les cinéastes, par ces retours, cherchaient la consolation. La réparation. Malgré eux parfois…
« Cauchemars, fantômes et squelettes, laissez flotter vos idées noires près de la marre aux oubliettes. Tenue du suaire, obligatoire. », proférait le regretté Jacques Higelin dans sa chanson Champagne. Et les films de ce festival de Cannes 2019 se sont succédé dans une sarabande, furieuse, joyeuse, inquiétante parfois, de spectres et de zombies… Dans l’inventaire de ces apparitions sur lequel nous reviendrons, citons, à l’Acid, Vif-argent, joli premier long métrage de Stéphane Batut, où un jeune homme, entre deux mondes, retrouve une femme qui est bien du nôtre et l’a aimé passionnément.
Mais le cinéma est cette lanterne magique qui éclaire les fantômes, fait revenir ce qui n’est plus. A l’intérieur de la fiction, par la magie du flash-back, tout un chacun peut étreindre un amant de jeunesse (Sibyl de Justine Triet), retrouver une mère disparue (Douleur et Gloire de Pedro Almodovar), un mauvais souvenir (Le Traître)… Certains, comme Quentin Tarantino dans Once Upon a Time… in Hollywood, en appellent à des figures du cinéma, disparues depuis longtemps, telle Sharon Tate incarnée par Margot Robbie.
Et puis il y a, majestueuse et irréelle, soudain, la cathédrale Notre-Dame de Paris, avec sa flèche intacte et mêmes ses échafaudages, filmée par Elia Suleiman dans It Must Be Heaven…
Magie du cinéma, dans l’air de la salle de projection, quelque chose s’est transformé, aussi indescriptible que patent…